Électricité : contrats à prix dynamiques en Wallonie et à Bruxelles

prix dynamiques

D’ici fin 2025, les contrats d’électricité à tarification dynamique verront le jour en Wallonie et à Bruxelles pour les clients résidentiels. En Flandre, ces contrats sont déjà disponibles depuis janvier 2021.

Les dates de lancement de ces contrats à prix dynamiques dépendront de chaque fournisseur mais la période annoncée s’étendra de juin à novembre 2025. Elle viendra s’ajouter aux deux autres tarifications actuelles :

  • La fixe : prix de l’électricité fixé pendant un an et un peu plus élevé car il offre une garantie pour le client, qui se prémunit contre le risque du marché.
  • La variable : prix de l’électricité variant chaque mois ou chaque trimestre, calculé selon une formule basée sur un indice de marché (par exemple : ENDEX 303, ENDEX 103, EPEX DAM, etc.).

Mais alors, la tarification dynamique, c’est quoi ?

Le contrat à tarification dynamique est un système où le prix de l’électricité suit de près celui du marché. Contrairement à la tarification variable, dont les prix sont calculés sur une moyenne mensuelle, les prix dynamiques changent chaque heure et chaque jour, avec les prix du lendemain publiés entre 12h et 14h. Cela permet donc au client de connaitre les prix horaires à l’avance et de pouvoir adapter sa consommation, soit manuellement soit grâce à des appareils de domotique ou autres systèmes de pilotage intelligent.

Pour pouvoir souscrire à un tel contrat, il faudra disposer d’un compteur « communicant » (ou « intelligent »), et que le régime de comptage SMR3 soit activé par le gestionnaire de réseau de distribution (GRD). Le SMR3 permet au GRD de transférer des données, toutes les 15 minutes, au fournisseur du titulaire du compteur.

Comment varient les prix dynamiques dans une même journée ?

Les prix de l’électricité varient selon l’offre et la demande : ils sont généralement bas lorsque la production renouvelable est élevée et la consommation faible, et élevés lorsque la production est faible et la demande importante.

Ces prix peuvent parfois être négatifs, ce qui peut paraître contre-intuitif, mais ils reflètent un excès de production d’électricité, difficilement stockable, qu’il faut consommer en temps réel afin d’éviter un déséquilibre du réseau.

En clair, il est possible de recevoir de l’argent pour consommer de l’électricité excédentaire, mais cela ne concerne que la composante « énergie » (ou « commodité ») du prix. Les frais de réseau et les taxes fédérales restent dus et peuvent compenser ou annuler ce gain.

Les prix dépendront de plusieurs facteurs comme la demande qui varie en fonction de la saison, du jour de la semaine et de l’heure de la journée. En hiver, la consommation d’électricité en Belgique est environ 50% plus élevée qu’en été, à cause des besoins de chauffage, en partie électrifiés. Pour les jours de la semaine, la demande est plus faible les week-ends et jours fériés.

Au cours de la journée, différents pics influencent également les prix comme celui du matin, entre 7h et 10h, et celui du soir entre 18h et 21h. En milieu de journée, la consommation est modérée (sans tenir compte de l’autoconsommation des unités de production décentralisée comme les panneaux photovoltaïques). Enfin, c’est pendant la nuit que la consommation est la plus basse.

La production influence également les prix de l’électricité. Avec le mix électrique actuel, la production renouvelable est plus importante en été qu’en hiver. C’est le photovoltaïque qui domine la production estivale, tandis qu’en hiver c’est l’éolien. Le photovoltaïque est concentré en journée, avec un pic en milieu de journée. L’éolien a tendance à produire plus la nuit que la journée. Le nucléaire belge fonctionne en continu et la variation de sa puissance est limitée. Le solaire et l’éolien ont donc une complémentarité assez forte.

D’autres facteurs jouent aussi un rôle comme les échanges d’électricité transfrontaliers ou encore l’indisponibilité d’installations de production due à la maintenance ou travaux dans des centrales, par exemple.

Le graphe suivant montre les prix moyens du marché « day-ahead » (autrement dit un jour à l’avance) sur trois périodes : la saison froide (novembre à février), la saison chaude (avril à septembre) et l’inter saison (mars et octobre).

prix dynamiques
Source : Energie Commune

Les différences intra journalières sont plus marquées en saison chaude du fait de la production photovoltaïque importante en milieu de journée.

Mais il faut souligner que ces prix concernent la partie « énergie » du kWh acheté. Pour obtenir le prix total de prélèvement, il faut ajouter : la cotisation énergie verte, les frais de réseau (transport et distribution) et les taxes fédérales (accises, obligations de services publics, …)

Ci-dessous, le même graphe intégrant toutes les composantes. Lorsqu’on regarde la situation dans son ensemble, les variations de prix dans une même journée sont nettement moins spectaculaires. On remarque que les prix sont, en moyenne, assez souvent en-dessous du tarif normal moyen des fournisseurs d’énergie (30,4 c€/kWh tout compris pour 2024). Mais cela ne garantit pas qu’un consommateur soit capable de capter les prix en consommant au bon moment.

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Source : Energie Commune

Est-ce intéressant économiquement ?

Cela dépend du profil de consommation et de sa flexibilité, soit sa capacité à déplacer des consommations dans le temps. Si une grande partie de la consommation a lieu (ou pourrait être déplacée) lors des moments de la journée où l’électricité est peu chère, alors cela peut être intéressant économiquement.

Le contrat à prix dynamiques est destiné à aux personnes connaissant bien leur consommation d’électricité et les facteurs externes impactant son marché.

Certains utilisateurs ont plus de potentiel de flexibilité du fait de leurs appareils électriques ou de leur emploi du temps. Voici quelques exemples :

  • Les propriétaires de voitures électriques ont généralement plus de latitude pour programmer la charge de leur véhicule grâce à des applications plus ou moins automatisées.
  • La production électrique d’eau chaude sanitaire peut offrir une plus grande marge de manœuvre pour capter des prix intéressants.
  • De même, quelqu’un qui est souvent en télétravail aura la possibilité de lancer des appareils électro-ménagers en milieu de journée.
  • Des commerces ayant des profils de consommation en adéquation avec les prix plus bas peuvent y trouver un avantage.
  • A contrario, une cuisinière électrique permet peu de flexibilité lorsqu’il s’agit de cuisiner le repas du soir, qui est généralement un moment de la journée où l’électricité est très chère.

Plus haut, nous avons analysé les prix de la tarification dynamique, mais ce n’est qu’une partie de l’analyse à faire, car il faut estimer quels prix le consommateur va réellement être en mesure d’obtenir. Pour cela, il faut calculer la facture annuelle, en simulant un profil de consommation (quart-)horaire résidentiel et calculer pour chaque (quart d’) heure le prix qu’il devra payer pour son électricité. Pour cet exercice, nous avons considéré 2500 kWh de consommation sans production électrique d’eau chaude sanitaire, ni aucun autre appareil très énergivore (véhicule électrique, pompe à chaleur, …). Au total, pour les prix de 2024, la tarification dynamique a engendré un surcoût de 2% par rapport à la tarification variable pour ce profil.

Cependant, il s’agit d’un profil de consommation qui n’est pas forcément représentatif de tous les ménages. La variété de profils est importante selon les appareils électriques présents et leur usage.

Dès lors, nous avons simulé quelques centaines de profils résidentiels variés et comparé les factures entre un contrat à prix variables et un contrat à prix dynamiques. Nous avons observé une grande variété de résultats, ce qui est normal étant donné la grande variété de profils de consommation au sein de la population belge :

  • D’une part, la grande majorité des ménages (80%) ont une variation nulle ou modérée (entre -5 et +5%) de leur facture d’électricité.
  • D’autre part, environ 20% des ménages voient leur facture augmenter de 5 à 17%.

Il est important de souligner que les profils utilisés n’ont pas eu accès à une tarification dynamique et n’ont donc pas essayé d’adapter leur comportement aux heures les moins chères. Une partie des ménages a une capacité d’adaptation plus ou moins importante, mais ce n’est pas le cas de tout le monde, les résultats de la tarification dynamique pourraient être légèrement plus positifs en tenant compte de changements de comportements.

Selon la CREG, une mauvaise utilisation d’un contrat à prix dynamiques peut provoquer une hausse allant jusqu’à 15% du coût de la composante énergie de la facture, ce qui corrobore les résultats obtenus dans nos simulations.

Prix dynamiques : intéressants si j’ai des panneaux photovoltaïques sur mon toit ?

Non, ce n’est généralement pas un duo gagnant parce que cette tarification offre de grandes différences de prix intra journalières lorsqu’il y a beaucoup de production photovoltaïque. Dès lors, si vous possédez des panneaux, vous ne prélevez pas (ou très peu) du réseau lors de ces moments, le contrat à prix dynamiques a donc peu d’intérêt pour vous. De plus, lors de certaines périodes de forte production photovoltaïque (par exemple lors d’une journée ensoleillée pendant un week-end d’été), vous devriez même payer votre fournisseur pour l’injection sur le réseau.

Les simulations que nous avons réalisées sur un grand nombre de profils de ménages ayant des panneaux PV ont montré que plus de 99% d’entre eux payaient plus cher avec un contrat dynamique. L’augmentation médiane sur la facture est de 20%, mais elle peut s’approcher du doublement de la facture dans certains cas extrêmes.

Quel rôle peuvent jouer les batteries domestiques pour bénéficier de l’électricité lorsqu’elle est bon marché ?

Si vous avez des panneaux photovoltaïques et une batterie domestique : la tarification dynamique ne sera certainement pas d’un grand intérêt. Votre facture ne sera pas énormément impactée, du fait qu’une partie déjà conséquente de votre électricité provient de votre propre production et stockage. S’il y en a un, le gain serait faible, mais étant donné que cela dépend fortement de votre profil de consommation, il y a des exceptions.

Si vous n’avez pas de panneaux photovoltaïques : une batterie domestique couplée à un tarif dynamique n’est pas très intéressante, car bien qu’elle vous permette d’avoir accès à des kWh à des prix avantageux, cette électricité stockée subit des pertes équivalentes à 25%.

Par exemple, lors d’une bonne journée, chaque kWh acheté à 20 c€/kWh (tout compris) et chargé dans la batterie permettra de décharger 0,75 kWh le soir-même et éviter de prélever à 35 c€/kWh du réseau, soit un montant de 26 c€. Dès lors, vous avez réalisé une économie de 6c€ pour ce kWh stocké lors d’une bonne journée d’été. Cependant, de telles différences de prix ne sont pas présentes tous les jours de l’année. Lorsque l’on fait les calculs pour une année entière on remarque que les gains sont très faibles (environ 100 € par an pour une batterie de 5 kWh et une consommation annuelle de 2500 kWh) en comparaison avec le montant à investir dans une batterie (environ 2500 € pour 5 kWh à la fin 2024) et sa durée de vie d’environ 15 ans. Aujourd’hui, cela n’a pas beaucoup de sens, mais les circonstances pourraient évoluer.

Conclusion

La nouvelle tarification dynamique permet aux consommateurs résidentiels d’avoir accès à des prix plus proches de la réalité du marché de l’électricité. Opter pour ce type de contrat peut représenter une opportunité pour certains profils spécifiques de consommation ainsi qu’à des consommateurs ayant une bonne flexibilité, c’est-à-dire déplacer des consommations au bon moment. Cependant, elle peut représenter une augmentation de facture allant jusqu’à 15% pour des profils inadaptés ou peu flexibles. C’est donc une tarification qui est réservée pour des consommateurs qui ont une bonne connaissance de leur profil de consommation, qui ont des appareils électriques flexibles et qui ont une certaine compréhension du marché de l’électricité et des facteurs qui l’impactent.