Pour le climat, ils enlèvent le gaz réfrigérant des pompes à chaleur… !

Si les pompes à chaleur (PAC) font bien partie des solutions à implémenter dans le cadre d’une transition énergétique qui considère les enjeux climatiques, on oublie souvent les inconvénients de ces systèmes. Spécifiquement, l’important pouvoir à effet de serre des gaz qui y circulent. Certains pensent donc tout simplement à les enlever.

Les gaz à effet de serre et les PAC

Actuellement, la technologie dominante des PAC consiste à comprimer un gaz puis le détendre pour lui permettre de transmettre de la chaleur d’un endroit plus froid vers un endroit à chauffer. Comme l’illustre le tableau suivant, la plupart de ces gaz (appelés aussi fluides frigorigènes) sont caractérisés par un important pouvoir d’effet de serre ou potentiel de réchauffement global (GWP pour Global Warming Potential).

Par exemple, à quantité équivalente, le R-410A possède un pouvoir d’effet de serre plus de 2 000 fois supérieur au CO2.

Pour se prémunir de cet inconvénient majeur, l’Europe a développé une réglementation qui tend à interdire progressivement les gaz les plus problématiques et à réglementer l’usage des autres (pose, contrôle des fuites, récupération …) pour éviter toute perte vers l’atmosphère.

Toutefois, cette caractéristique de potentiel de réchauffement global est à relativiser selon la performance de la PAC. En effet, plus la PAC est performante, plus elle permettra des économies importantes de CO2 durant son utilisation et donc plus l’inconvénient GWP de son gaz est limité. 

Une performance à améliorer

Depuis deux décennies, on observe une stagnation dans l’évolution des performances des PAC.

Les gaz réfrigérants les plus performants ayant d’abord été bannis pour limiter les impacts négatifs sur la couche d’ozone, ils le sont actuellement à cause de leur niveau de GWP trop important.

Etant donné sa toxicité pour l’être humain, l’ammoniac n’est utilisable que dans des secteurs très contrôlés.

Le CO2, utilisé comme gaz réfrigérant, doit être placé à des niveaux de pression compris entre 50 et 130 bars (soit 3 à 4 fois plus que dans une PAC résidentielle), ce qui le cantonne à de gros systèmes dédiés à l’industrie ou à des centres commerciaux.

Les PAC au CO2 ou à l’ammoniac, avec un faible GWP, ne connaissent donc pas vraiment d’applications résidentielles aujourd’hui.

Certains acteurs de la recherche se tournent alors vers une solution qui permettrait de se passer totalement de fluide réfrigérant tout en augmentant les performances des PAC.

L’effet électro-calorique comme solution ?

L’idée est de remplacer les étapes de pression et détente du gaz par un transfert de chaleur qui utilise des matériaux dont le comportement thermique varie s’ils sont placés dans un champ électrique.
Certains matériaux diélectriques polaires, dit « électro-caloriques », peuvent émettre ou capter de la chaleur au cours d’un cycle de polarisation de leur matière. La polarisation entraîne une diminution de l’entropie avec augmentation de chaleur, ce qui rend le matériau « émetteur potentiel ». A l’inverse, sa dépolarisation rétablit une entropie plus grande et génère un refroidissement du matériau, ce qui le rend potentiellement « absorbeur de chaleur ».

Figure 2 – Comparaison schématique du cycle électrocalorique (2.a, à gauche) et du cycle à compression de vapeur (2. b, à droite)

Alors qu’une modification de la température est classiquement obtenue en modifiant la pression d’un gaz (figure 2.b ), dans le cas d’un matériau électro-calorique, le changement de température de celui-ci est obtenu par une variation du champ électrique (figure 2.a)

L’idée est donc de soumettre ces matériaux à un champ électrique qui, en les polarisant, les rend émetteurs de chaleur, afin de diffuser cette chaleur vers le milieu à chauffer (la source chaude).

Cela permet de donc de se passer du gaz et du compresseur. Il reste cependant un besoin d’électricité pour créer le champ électrique.

C’est vraiment plus efficace ?

Une récente publication du Fraunhofer Institute, démontre que ce type de technologie permettrait d’atteindre des performances nettement supérieures aux systèmes des PAC actuelles et donc, outre l’absence de gaz, le besoin en électricité pour alimenter ces PAC serait encore réduit.

L’étude allemande promet des coefficients de performances (COP) de 5 à 6, soit presque deux fois plus que certaines PAC air-air traditionnelles.

L’avancée est significative et notable, mais la publication du Fraunhofer précise bien qu’il s’agit d’un état de l’art sur l’amélioration théorique d’une étape du cycle complet, à savoir l’alimentation en électricité.

D’autres étapes restent nécessaires dans l’espoir d’atteindre concrètement les performances théoriques que ce système laisse présager afin de pouvoir transposer ces résultats de laboratoire en produits commercialisables à grande échelle.

Notre conclusion

Si la perspective de découvrir cette révolution dans les pompes à chaleur est séduisante, inutile d’attendre les résultats de ces travaux pour démarrer les démarches d’isolation et envisager un changement de système de production de chaleur dans nos bâtiments.

Le temps nous est compté et réduire les besoins de chaleur reste la première option à considérer.