Des technologies disruptives pour optimiser le photovoltaïque ?

Des technologies disruptives pour optimiser le photovoltaïque

L'optimisation de la performance et de la durabilité des panneaux photovoltaïques demeure l'un des éléments clés de la décarbonation mondiale. Pour y arriver, il semblerait qu'un recours à des technologies de rupture soit nécessaire ou, à tout le moins, utile.

Selon les Nations Unies, plus de 100 pays ont pris l’engagement d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Pour décarboner complètement les systèmes électriques mondiaux au cours des années 2050-2060, une étude du National Renewable Energy Laboratory (NREL) américain publiée dans la revue Solar, révèle que sur la base de la seule technologie photovoltaïque, il faudrait installer 63,4 TW de capacité photovoltaïque. Les résultats de l’étude, publiée dans la revue Solar RRL, mettent en évidence l’importance des technologies disruptives pour optimiser le photovoltaïque tout en réduisant les coûts et en répondant aux opportunités de marché.

Les chercheurs du NREL ont modélisé des trajectoires viables pour atteindre plus de 60 TW de capacité solaire installée afin de parvenir à la décarbonation mondiale. Le modèle exploite efficacement les avantages de la courbe d’expérience dans le processus de fabrication et les avancées continues dans les technologies de conception des produits. Cependant, le défi de l’expansion à grande échelle est amplifié car les trajectoires qui atteignent cet objectif nécessitent une augmentation sans précédent de la capacité de production sur seulement deux décennies, suivie d’une demande relativement modeste pour maintenir la base installée et soutenir la croissance démographique continue. Jusque-là, rien de neuf, on le sait, il faut réduire la demande tout en augmentant l’offre d’électricité décarbonée. Là où elle devient intéressante, c’est lorsque l’étude démontre qu’une expansion durable de la production est en effet possible et montre que le déploiement de la capacité de fabrication requise peut être accéléré et réalisé à moindre coût total en introduisant des technologies perturbatrices ayant un investissement nécessaire plus faible, un coût énergétique intégré plus réduit et une efficacité plus élevée. Par technologie perturbatrices, ou technologies disruptives, on entend des innovations technologiques qui perturbent ou bouleversent les marchés établis ou les comportements habituels. Elles introduisent souvent une façon complètement nouvelle de réaliser une tâche existante, ou peuvent même créer un tout nouveau marché.

Réduction continue des coûts de fabrication par l’industrie PV

Les chercheurs américains ont étudié l’impact d’une technologie de rupture sur les coûts de déploiement et les opportunités de marché. Selon eux, il est possible d’augmenter la production pour atteindre les 2,9 à 3,7 TW nécessaires chaque année dans un délai de 10 à 15 ans. Cet objectif représentera un investissement compris entre 600 et 660 milliards de dollars. Le modèle intègre à la fois des technologies existantes et des technologies matures utilisant le silicium et le tellurure de cadmium (CdTe). Les chercheurs estiment que les technologies de rupture offrent un potentiel de marché de 1 à 2 milliards de dollars, avec des possibilités de réduction des coûts de plusieurs centaines de milliards de dollars.

Un approvisionnement diversifié et donc…plus sûr

Les évènements en Ukraine et leurs répercussions mondiales ont démontré combien les facteurs mondiaux peuvent également affecter différemment les chaînes d’approvisionnement des différentes technologies. Ce qui souligne l’importance de déployer diverses technologies PV de rupture pour atténuer la vulnérabilité de la chaîne d’approvisionnement due à la dépendance à des ressources critiques disponibles dans un nombre limité de pays. Et ce toujours dans le cadre de la recherche d’une optimisation des panneaux, sujet à maintes fois soulevé comme nous l’évoquions il y a encore quelques mois dans cet article.

Quelles alternatives ?

Les technologies de rupture évoquées ici comprennent le photovoltaïque à base de tellurure de cadmium (CdTe), ou, à cause de la rareté de ces composantes, de pérovskites et de technologies tandem. Actuellement, le CdTe représente environ 40 % du marché solaire américain et 5% du marché mondial. Les pérovskites, bien qu’elles posent des problèmes de durabilité à long terme, offrent des avantages en termes de fabrication grâce à leur méthode d’impression rapide et peu coûteuse. Les technologies tandem, qui associent différentes technologies, telles que la pérovskite sur le silicium, sont, elles, encore en cours de développement.

Avancer à temps !

Toujours selon le NREL, les dispositifs tandem et les minimodules peuvent atteindre des rendements allant jusqu’à 31,25 %. Bien que ces rendements soient prometteurs et que d’autres technologies tandem soient en développement, des travaux de recherche et développement sont nécessaires pour les fabriquer à grande échelle afin d’atteindre des capacités térawatt. Jao van de Lagemaat, directeur du centre de chimie et de nanoscience au NREL, affirme « qu’il existe des trajectoires économiquement viables pour répondre à la demande croissante en photovoltaïque et que les technologies émergentes pourraient réduire considérablement les coûts de déploiement si elles sont commercialisées à temps ».

Produire plus et pour plus longtemps

L’analyse du NREL indique donc que pour fournir suffisamment d’énergie solaire au cours des deux prochaines décennies et décarboner le système électrique mondial, il faudra une montée en puissance ambitieuse de la capacité de production. Le modèle démontre qu’une augmentation durable de la fabrication est possible et que les technologies de rupture joueront un rôle clé dans la réduction des coûts d’investissement. De plus, une hypothèse soutient que la durée de vie des modules photovoltaïques augmentera considérablement, passant d’une moyenne de 30 ans en 2020 à 50 ans en 2040. Au-delà des années 2050-2060, une fois que la décarbonation mondiale sera atteinte, le retrait des modules ou leur remplacement partiel (sans doute plus de performance sur moins d’éléments) et la croissance démographique deviendront les moteurs d’une demande relativement modeste. D’ici là, continuons à viser la lune pour tirer meilleur parti du soleil.