Centrales photovoltaĂŻques au sol : choisir des sites prioritaires, sans incidence pour les riverains

Les projets de centrales solaires sur des sites naturels suscitent des débats et oppositions locales. Or le Gouvernement wallon pourrait donner priorité aux friches industrielles, aux parkings, aux toitures agricoles ou à l’agrivoltaïque, en s’appuyant sur un cadastre.

Les projets de centrales photovoltaĂŻques au sol – ou champs solaires – sur des sites naturels, bien que peu nombreux en Wallonie, suscitent dĂ©sormais des dĂ©bats et des oppositions de riverains. 

On peut les comprendre. Est-il bien pertinent d’installer une centrale solaire dans une prairie Ă  proximitĂ© d’habitations ou dans un espace naturel propice Ă  la promenade ? 

“Le prix très compĂ©titif du photovoltaĂŻque pousse en effet les dĂ©veloppeurs Ă  proposer des projets lĂ  oĂą des terrains sont disponibles, sans trop se soucier des incidences locales”, explique Benjamin Wilkin, SecrĂ©taire GĂ©nĂ©rale de l’APERe. “Or le Gouvernement wallon – et la filière – aurait intĂ©rĂŞt Ă  dĂ©velopper une stratĂ©gie et orienter le marchĂ© en prioritĂ© sur les sites marginaux tels que les friches industrielles et les parkings.” 

Ces sites reprĂ©sentent en effet un grand potentiel de valorisation solaire, car ces sols sont dĂ©jĂ  artificialisĂ©s (bĂ©tonnĂ©s) et n’entrent pas en concurrence avec d’autres usages possibles (agricole, commercial, industriel, …). Il n’y a donc pas d’arbitrage Ă  faire ; on valorise simplement ces surfaces par une production d’électricitĂ© renouvelable. 

“De plus”, poursuit Benjamin Wilkin, “les anciens sites industriels se trouvent souvent Ă  proximitĂ© de postes de raccordement au rĂ©seau Ă©lectrique, ce qui facilite l’intĂ©gration de ces centrales solaires au rĂ©seau. Mais, pour dĂ©velopper une telle stratĂ©gie, la filière a besoin d’un cadastre des sols.” 

 

Les parkings et les friches, ce grand potentiel solaire 

  

En France, l’Agence de l’Environnement et de la MaĂ®trise de l’Energie (ADEME) a ainsi publiĂ© une Ă©tude qui souligne L’important potentiel des friches et parkings pour l’énergie photovoltaĂŻque). 

L’Agence estime ce potentiel en France Ă  53 GWc, rĂ©parti Ă  93 % sur les friches (49 GWc) et Ă  7 % sur les parkings (4 GWc). 

Sur certaines friches, les Ă©ventuelles dĂ©molitions et dĂ©pollutions du sol ne constituent donc pas des contraintes insurmontables pour y dĂ©velopper des centrales photovoltaĂŻques. 

En Wallonie, rĂ©gion très marquĂ©e par son passĂ© industriel, un cadastre comptabilise 3.795 ha de sites Ă  rĂ©amĂ©nager (carte ci-dessous). 

La SPAQUE, entreprise spĂ©cialisĂ©e chargĂ©e de rĂ©habiliter ces sites, y a dĂ©veloppĂ© plusieurs projets photovoltaĂŻques, notamment sur d’anciennes dĂ©charges (Mellery, Hensies, Les Isnes) et sur les anciens sites industriels « SAFEA » Ă  La Louvière (1 MWc) et des « Nouveaux ateliers mĂ©caniques » Ă  Morlanwelz (750 kWc). D’autres projets sont en cours. 

Au niveau des parkings photovoltaĂŻques, le jardin zoologique PAIRI DAIZA dispose dĂ©sormais du plus grand carport solaire du monde (illustration ci-dessous). 

Les 62.750 panneaux solaires couvrent une surface de 104.000 m2, pour une puissance totale de 20 MWc, ce qui en fait aussi la production photovoltaĂŻque la plus puissante de Wallonie (lire notre article PAIRI DAIZA construit le plus grand parking photovoltaĂŻque au monde).

Ce genre de rĂ©alisation est faisable sur les innombrables parkings de supermarchĂ©s et de gares notamment. 

Selon les estimations de l’APERe, le potentiel en Belgique est très Ă©levĂ© : au moins 2,5 GWc sur les friches industrielles et 200 MWc sur les parkings. Ce potentiel mĂ©riterait nĂ©anmoins d’être chiffrĂ© plus prĂ©cisĂ©ment. 

« Ces surfaces peuvent ĂŞtre facilement valorisĂ©es par des projets photovoltaĂŻques », estime Benjamin Wilkin. « Le modèle de PAIRI DAIZA mĂ©riterait d’être largement rĂ©pliquĂ©. Et il y a certainement moyen de faire plus que 10 parkings solaires de ce type en Belgique, pensons Ă  Walibi par exemple. » 

 

Les hangars agricoles, comme chez nos voisins 

 

Au Grand-DuchĂ© du Luxembourg, on peut rencontrer des villages dĂ©centralisĂ©s au sein desquels il y a plus de panneaux solaires sur les toitures agricoles, que de vaches dans les prĂ©s. 

Cette politique d’équipement, dĂ©marrĂ©e il y a plus de 10 ans, permet de rĂ©aliser des installations solaires de plus grande taille – donc moins chères – tout en offrant une diversification de revenus aux agriculteurs sans artificialiser de nouvelles surfaces. 

ConnectĂ©es au rĂ©seau, ces village-piles photovoltaĂŻques, alimentent en journĂ©e les centres urbains singeant les flux alimentaires qui possèdent la mĂŞme dynamique. En passant, divers besoins locaux sont Ă©galement satisfaits. 

Nous pourrions aisĂ©ment imaginer un système de promotion spĂ©cifiquement dĂ©diĂ© au monde agricole, en Belgique, afin d’atteindre les mĂŞmes rĂ©sultats que par-delĂ  la frontière. 

Les trois fermes de Hautbellain, au Grand DuchĂ© du Luxembourg, sont toutes Ă©quipĂ©es de photovoltaĂŻque. Avec 213 habitants dans la commune, cela reprĂ©sente pas loin de 20 panneaux par habitant.

 

L’agrivoltaĂŻque, un autre potentiel intĂ©ressant 

 

Outre les friches industrielles, les parkings et les hangars, les dĂ©veloppeurs auraient Ă©galement intĂ©rĂŞt Ă  investir dans l’agro-photovoltaĂŻque (ou agrivoltaĂŻque). 

Cette application technologique consiste Ă  installer une infrastructure solaire au-dessus de terres cultivables, ce qui permet de combiner productions agricoles et Ă©nergĂ©tiques (voir photo ci-dessous). 

Les projets-pilotes en Europe montrent que la lumière au sol reste suffisante pour la photosynthèse et que certains lĂ©gumes y trouvent un milieu plus favorable Ă  leur croissance (lire notre article Agriculture et photovoltaĂŻque peuvent utiliser une mĂŞme surface); tandis que l’agriculteur perçoit un revenu pour accueillir cette infrastructure. 

Si de nombreuses rĂ©alisations existent dĂ©jĂ  dans le monde, il n’existe pas encore de centrales agrivoltaĂŻques en Belgique – Ă  l’exception d’un projet pilote dans un verger de poires en Brabant flamand (lire cet article de RĂ©volution Ă©nergĂ©tique). 

Or le potentiel solaire est ici aussi intĂ©ressant Ă  valoriser, car il n’entre pas non plus en concurrence avec un autre usage du sol et n’aura pas – ou peu – d’incidence sur l’environnement local et le voisinage. 

Autant de pistes, donc, Ă  explorer et dĂ©velopper pour assurer une intĂ©gration harmonieuse de la filière photovoltaĂŻque sur le territoire wallon. 

 

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Un champ solaire Ă  Arlon co-financĂ© par des citoyens 

Les champs solaires poussent en Wallonie