La récente édition 2016 du World Energy Outlook de l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) présente une vision du secteur énergétique mondial à l’horizon 2040. Cette vision intègre les promesses des 196 pays engagés dans l’Accord de Paris. En voici les principaux enseignements.
Le World Energy Outlook (WEO), publié chaque année par l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), fait référence dans le secteur de l’énergie. Le rapport dresse un constat des dernières évolutions et présente, au travers de différents scenarii, des perspectives d’évolution pour tous les types de combustibles fossiles, les énergies renouvelables, le nucléaire, le secteur de l’électricité et l’efficacité énergétique. Il consacre aussi des chapitres spécifiques à des thématiques spéciales. L’édition 2016, publiée en novembre dernier, présente ainsi le lien entre le secteur de l’énergie et celui de l’approvisionnement en eau.
Le résumé exécutif met en exergue le scenario 2040 basé sur la mise en œuvre des contributions nationales (National Determined Contribution) inscrite dans l’Accord de Paris (lire notre article Accord sur le Climat : Les principales dispositions).
L’Accord de Paris est entré en vigueur le 4 novembre 2016, le double critère ayant été atteint 30 jours plus tôt. Ce double critère était : minimum 55 pays ayant ratifié l’Accord, représentant ensemble au moins 55% des émissions mondiales. Aujourd’hui, 117 pays – sur 197 signataires – ont ratifié l’Accord (voir le site de l’UNFCCC).
Scénario pour 2040 selon les promesses des pays de la COP21
Le scenario « Path to 2040 » intègre les contributions nationales de l’ensemble des pays inscrites dans le cadre de l’Accord de Paris.
En 2040, la demande mondiale d’énergie primaire aura augmenté de 30% par rapport à aujourd’hui. Cette croissance est portée par les pays émergents, comme le soulignait déjà le WEO 2015 (lire notre article World Energy Outlook : l’énergie change de cap). Le taux d’électrification sera amélioré, mais il restera toujours un demi-milliard de personnes sans accès à l’électricité (1,2 milliard aujourd’hui).
Les énergies fossiles continueront à être la principale source énergétique d’approvisionnement avec une production de pétrole qui atteindra 103 mb/j (millions de baril par jour) contre 92 mb/j aujourd’hui. Le gaz naturel augmentera fortement avec + 50% d’approvisionnement par rapport à aujourd’hui. Et le charbon verra son récent regain d’intérêt stoppé. Il connaitra une forte baisse en Europe et aux Etats-Unis, mais se maintiendra en Inde et d’autres pays émergents.
Figure : Scenario Path 2040 : 37% d’électricité renouvelable en 2040 contre 23% aujourd’hui. AIE
La plupart des pays misent sur les énergies renouvelables dans leur Plan d’actions national. Les énergies renouvelables progresseront pour atteindre un taux de 37% de l’électricité consommée dans le monde, contre 23% aujourd’hui. Une volonté de progression qui s’explique par leur efficacité à réduire les émissions de CO2 et les nombreux bénéfices socio-économiques de leur développement. Mais cette transformation ne se fera pas sans difficulté. Leur présence dans le paysage fait débat et pose la nécessité de leur acceptation. Leur intégration dans les réseaux électriques reste un nécessaire défi et il s’accompagnera d’une adaptation des règles actuelles de marché.
Le nucléaire reste discret dans ce scenario 2040. Seule la Chine verra sa production électrique nucléaire augmenter.
Le secteur du transport sera marqué par le développement de la mobilité électrique. Le nombre de véhicules électriques atteindra 150 millions et réduira ainsi de 1,3 mb/j la demande de pétrole mondiale.
Les émissions de CO2 du secteur énergétique mondial continueront de croître avec un rythme de + 0,5% par an. La tendance à la croissance sera donc ralentie par rapport à la période depuis 2000 qui a connu un rythme de croissance des émissions de + 2,4%.
Figure : Emissions de CO2 observées jusqu’à l’accord de Paris et émissions du scénario » Path 2040 » et » 2°C scenario » aussi nommé par l’AIE » 450 scenario » ; AIE
Les promesses de l’Accord de Paris permettront de réduire la tendance de croissance actuelle des émissions de CO2, mais elles sont largement insuffisantes pour contenir l’objectif de maintenir le niveau d’augmentation à 2°C d’ici 2100. Seule une société neutre en carbone en 2100 permettra de ne pas dépasser une concentration de CO2 de 450 ppm et de limiter le réchauffement à 2°C.
Ce constat devrait amener les différents pays à revoir leur contribution nationale avec davantage d’ambition climatique. Ils ont en effet la possibilité de revoir leur contribution à tout moment, mais uniquement à la hausse. Un état des lieux international est prévu en 2018, puis tous les 5 ans, pour évaluer la trajectoire par rapport aux objectifs de 2°C et même 1,5°C. Ce qui permettrait d’espérer une trajectoire plus ambitieuse en termes de lutte contre les changements climatiques (lire notre article Accord sur le Climat : Les principales dispositions).
L’énergie et l’eau : l’un ne va pas sans l’autre
Chaque année, le World Energy Outlook consacre un chapitre spécifique à une thématique spéciale. En 2016, le WOE aborde l’interdépendance du secteur de l’énergie et du secteur de l’eau. Le secteur de l’énergie nécessite de grandes consommations d’eau dans sa chaîne énergétique. Et le secteur d’approvisionnement en eau est un grand consommateur d’énergie.
Le secteur de l’énergie est responsable de 10% des problèmes de pénurie d’eau dans le monde. En particulier, les grandes centrales thermiques nécessitent de grande quantité d’eau dans la phase de refroidissement de leur cycle de production d’électricité. Et la production de biocarburants est aussi pointée comme grande consommatrice de ressource en eau dans sa chaîne énergétique. L’AIE rappelle que l’éolien et le solaire photovoltaïque sont par contre des technologies qui produisent de l’électricité sans consommer d’eau.
De l’autre côté, l’AIE estime que le secteur de l’approvisionnement en eau et du traitement des eaux usées consomme aujourd’hui 4% de l’électricité mondiale. La tendance est à la hausse portée par l’augmentation des capacités des projets de désalinisation de l’eau en particulier dans les pays du Moyen Orient et du nord de l’Afrique. En 2040, le secteur d’approvisionnement en eau au Moyen Orient consommera 16% de l’électricité.
Le SPF Energie et Agoria organisent une présentation du World Energy Outlook 2016, le 3 février 2017 à Bruxelles, avec la participation de M. Fatih Birol, Directeur Exécutif de l’Agence Internationale de l’Energie (AIE).