Les propriétaires bruxellois qui font appel à un tiers-investisseur peuvent, sans débourser un euro, bénéficier d’une installation photovoltaïque et donc d’une facture d’électricité réduite. Cette formule est aussi intéressante pour les bâtiments loués. A condition de bien analyser les formules proposées.
Le tiers-investissement n’a pas toujours eu bonne réputation dans le secteur solaire photovoltaïque en Belgique, en raison de certains abus qui ont eu lieu lors du grand boom de la filière en Wallonie (2009-2012) (lire notre article Les « sans panneaux » ne devront plus rembourser leur crédit).
Cette formule reste pourtant intéressante, principalement en Région bruxelloise où le niveau de soutien est important pour les petites installations. Plusieurs tiers-investisseurs y mènent d’ailleurs un démarchage très actif auprès des ménages. La formule est par contre a priori moins intéressante en Wallonie.
Voici quelques conseils si vous habitez Bruxelles et envisagez ce type de contrat pour équiper votre toit d’une installation photovoltaïque.
Après la lecture de cet article, vous pouvez également contacter le centre bruxellois Homegrade pour des conseils plus spécifiques.
Bénéficiez du soleil sans investir
Le tiers-investissement est une formule intéressante si vous ne disposez pas de fonds propres (ou ne souhaitez/pouvez pas contracter un crédit) pour investir dans une installation solaire. En effet, c’est le tiers-investisseur qui se chargera de financer l’installation et qui se rémunèrera sur la vente des certificats verts octroyés durant 10 ans.
Selon une analyse récente de l’APERe, le ménage bruxellois qui choisit cette formule y trouve un avantage économique réel car la production solaire permet d’économiser beaucoup d’argent sur la facture d’électricité. C’est même aussi rentable que si le ménage investit en fonds propres !
De même, les propriétaires de bâtiments loués peuvent y trouver une solution pour augmenter la valeur de leur bien (voir plus bas).
Cette opération s’avère d’autant plus efficace que le tiers-investisseur et son client ont un intérêt commun : maximiser la productivité de l’installation.
Ceci sera d’autant plus vrai à partir de 2020, lorsque la compensation prendra fin à Bruxelles. Le ménage aura alors tout intérêt à autoconsommer au maximum sa production solaire. L’installation devra dès lors être dimensionnée pour répondre au mieux à cette nouvelle logique. Pour une puissance nominale AC onduleur de 10 kVA, l’optimum économique consistera ainsi à installer aux alentours de 12 kWc (lire notre article Comment optimiser la rentabilité d’une installation photovoltaïque à Bruxelles à partir de 2020).
A noter que les tiers-investisseurs sont très sélectifs sur les toits qu’ils équipent – bonne orientation, pas d’ombrage, … – afin de minimiser leurs coûts à l’installation et dégager une marge bénéficiaire suffisante pour leur activité.
En général, le contrat de tiers-investissement s’arrête au bout de 10 ans : les garanties sont alors transférées à l’installateur ou au fabricant et le client devient propriétaire de l’installation photovoltaïque.
Voilà pour les grands principes.
Mais analysez bien les formules
Avant de signer un contrat, veillez cependant à bien comparer les formules de tiers-investissement disponibles sur le marché bruxellois et vérifiez les clauses du contrat pour vous protéger contre les possibles abus ou « arnaques ».
C’est le tiers-investisseur qui doit assumer la majeure partie des risques tandis que le client doit être bien protégé.
Voici les conseils de l’APERe :
Un financement complet
Choisissez un tiers-investisseur qui finance la totalité de l’installation (évitez les formules qui vous demandent un financement partiel, car cela peut vous être très défavorable).
Responsabilités concernant le bon fonctionnement
La plupart des contrats incluent la notion de comportement de « bon père de famille » du client vis-à-vis de l’installation. Il convient de préciser par écrit ce que cela recouvre.
Le client n’est pas un professionnel du photovoltaïque et ne peut donc pas être responsable du bon fonctionnement de l’installation. Il n’est pas non plus censé effectuer une quelconque opération de maintenance, tant préventive que corrective, ni informer le tiers-investisseur d’un éventuel problème sur l’installation.
C’est bien le tiers-investisseur qui doit assurer la gestion et maintenance de l’installation. Celui-ci placera par exemple un outil de monitoring pour veiller, dans son propre intérêt, à une production optimale en tout temps.
Par contre, vous devez vous assurer de la durée de vie estimée de votre toiture avant d’accueillir des panneaux photovoltaïques. Vous serez également tenu responsable de tout préjudice porté au tiers investisseur à cause d’une intervention de votre part sur l’installation ou sur son environnement (par exemple une modification du bâtiment qui créerait un ombrage et une perte de production).
Garantie de production
Certains contrats incluent une garantie de production annuelle minimale. Vivement conseillé !
Indemnisations en cas de négligence
Vous réalisez par exemple des travaux de toiture et des panneaux sont endommagés par accident ? Votre négligence porte un préjudice économique au tiers-investisseur et il est normal qu’il vous demande des dédommagements.
Cependant, les montants à payer ne peuvent être disproportionnés par rapport au préjudice réel. Le tiers-investisseur peut uniquement faire valoir une perte de certificats verts et réclamer un dédommagement estimé à 20 c€ par kWh perdu, ce qui correspond au prix de vente de l’énergie aux particuliers à Bruxelles. Vérifiez la clause du contrat à ce sujet.
Cession du contrat
Vous déménagez et vendez votre maison ?
Le contrat avec le tiers investisseur doit permettre de transférer l’ensemble de ce contrat facilement et sans frais à une autre personne.
Cession de la propriété de l’installation
Le contrat doit stipuler très clairement quand s’effectuera le transfert de propriété entre le tiers-investisseur et le client (généralement après 10 ans). Ce transfert doit se faire sans frais, ou pour une somme symbolique, par exemple 1 €.
Assurances
Il est courant de mentionner un « tiers investisseur » à son assurance comme bénéficiaire d’indemnités en cas de dommages assuré par l’assurance, via l’ajout d’une clause au contrat. L’exemple classique est la voiture en leasing.
L’APERe donne cependant 3 conseils :
- Ne pas signer de contrat qui exige une prise d’assurance vol spécifique pour les panneaux photovoltaïques de la part du client.
- Le contrat signé avec un tiers investisseur ne doit donc pas mentionner plus de cas que ceux réellement couverts par l’assurance de l’assuré. Refuser des mentions de cas de dommages qui se terminent par des « etc » ou « … » car, dans ce cas, le contrat avec le tiers investisseur pourrait dépasser les cas couverts par l’assurance.
- En cas de dommage couvert, limiter le remboursement du tiers investisseur au prorata de la valeur résiduelle de l’installation.
Partage du contrat à des tiers
Certains contrats interdisent tout partage de son contenu de la part du client avec quiconque. Il s’agit d’une clause abusive. Le contrat peut être partagé à un nombre limité de personnes dans le cadre de l’obtention de conseils et de révisions avant signature.
Le client doit cependant mettre toutes les dispositions en oeuvre et faire preuve de bonne foi pour éviter tout préjudice commercial au tiers investisseur. Vous ne pouvez par exemple pas rendre ce contrat public et devez veiller à ce qu’il ne soit pas transmis à un concurrent du tiers-investisseur.
Sur les bâtiments loués aussi
Le tiers-investissement également peut s’avérer intéressant pour les propriétaires d’immeubles loués à Bruxelles.
En effet, les propriétaires non occupants peuvent, sans devoir investir, augmenter la valeur de leur bien :
- Soit lorsqu’ils revendront leur bâtiment, puisqu’ils pourront certifier que les factures d’électricité seront moins élevées ;
- Soit en limitant le vide locatif, puisque ces factures électriques allégées devraient attirer d’autres locataires.
De quoi inciter de nombreux propriétaires à équiper leurs bâtiments.
Booster la production solaire à Bruxelles à moindre coût
En finale, le principe de tiers-investissement pourrait ainsi permettre à la Région bruxelloise d’atteindre plus facilement ses objectifs de production d’électricité photovoltaïque, et ce à un moindre coût global.
En effet, selon la logique macro-économique, le tiers-investissement incitera un plus grand nombre d’habitants à s’équiper en panneaux solaires, pour un niveau d’aide déterminé.
De plus, à l’inverse d’un marché uniquement composé de particuliers soutenus par des primes, les tiers-investisseurs ont tout intérêt à continuer de faire pression à la baisse sur les prix des installations car ils augmentent, de ce fait, leur marge (au détriment des installateurs eux-mêmes).
Des sommes importantes pourraient ainsi être optimisées du côté des aides publiques à l’investissement dans les projets verts. La région bruxelloise aura donc tout intérêt à mettre en place une politique et un cadre favorable pour que les expériences positives en matière de tiers-investissement photovoltaïque se multiplient.