Pour limiter une hausse de CO2, la Belgique devrait doubler ses capacités d’énergies renouvelables, développer le stockage et la flexibilité et prolonger ...2 GW nucléaire.
Le Gouvernement fédéral a confirmé la sortie – totale ou partielle – du nucléaire en 2025, ce qui changera fortement le mix électrique et pose de nouveaux défis notamment en matière d’émissions de CO2.
L’APERe a analysé les statistiques 2021 publiées par Ember, think thank indépendant dédié à la transition énergétique, et comparé le mix électrique belge avec différents pays européens.
Il en ressort que la Belgique doit doubler ses capacités d’énergies renouvelables, développer le stockage et la flexibilité et prolonger …2 GW nucléaire – comme prévu par l’accord de Gouvernement fédéral – si elle veut maintenir le niveau des émissions de CO2 de 2025 au niveau de 2019.
Et même avec cet objectif ambitieux, il est probable que le secteur électrique connaisse une augmentation de 36% de ses émissions de CO2, par un recours plus important aux centrales à gaz.
Rappelons que cette situation résulte de l’inertie de la politique énergétique belge depuis 20 ans. Les Gouvernements successifs n’ont pas suffisamment préparé une sortie progressive du nucléaire par un développement plus important des productions d’électricité renouvelable notamment.
Voici l’évolution et la répartition du mix électrique belge entre les différentes filières utilisées (graphique ci-dessous).

En 2019, la production électrique belge atteint 167gr de CO2 par kWh produit (voir graphique ci-dessous) et constitue donc une référence pour les scénarios qui seront déployés d’ici 2025.

Sources :
Ember – Global electricity review 2021
European Environment Agency (2019)
Que devient le nucléaire en 2025 ? A quel pays ressembleront-nous ?
Selon l’analyse de l’APERe, le mix électrique belge en 2025 devrait ressembler au mix électrique actuel du Royaume Uni (graphiques ci-dessous).

Les capacités d’énergies renouvelables (bleu, jaune et rose) devraient doubler d’ici 2025, 2 GW nucléaire seraient prolongés (mauve) et le recours au gaz (gris) serait un peu plus important, d’où une hausse de 36% de nos émissions de CO2, sur base d’une consommation constante d’énergie.
Le parc éolien offshore devrait doubler dans les prochaines années (lire notre article La Belgique doublera sa puissance éolienne en mer du Nord).
Mais qu’en est-il des autres sources renouvelables ? Un projet éolien terrestre prend entre 5 et 10 ans, tout comme un projet biomasse, un projet photovoltaïque de taille modeste prend entre 6 et 18 mois et un grand projet solaire prend 24 mois.
Or, à ce jour, les Régions n’ont aucuns plans d’investissement massif dans les renouvelables ; tandis que l’Europe traîne à fixer des objectifs pour 2030.
Et rien ne dit que l’interconnexion avec le Danemark sera prête pour permettre une importation massive d’électricité verte (lire notre article La Belgique bientôt interconnectée avec le Danemark ?).
Agir sur la flexibilité
Il faut donc prévoir d’autres options et travailler sur la demande d’énergie (flexibilité) dès aujourd’hui. Cela nécessite des compteurs communicants et le soutien réels des gestionnaires de réseaux de distribution (GRD).
Des projets de flexibilité basse-tension, via des coopératives et communautés d’énergies, doivent être soutenus pour émerger à l’horizon 2025.
- Une Réserve citoyenne est en projet et vise à flexibiliser 200.000 à 6.5 millions consommateurs basse tension pour se passer d’une centrale au gaz, dans le cadre du CRM. Cela nécessitera un financement à hauteur de 100 à 300 millions d’euros en Belgique d’ici 2024 pour créer une offre agrégée significative.
- Il faut également stimuler les investissements locaux dans la production via une défiscalisation (TVA à 0%) sur l’énergie renouvelable produite et consommée localement et via des tarifs réseaux incitatifs (comme le propose Sibelga).
- La lutte contre la précarité énergétique devrait migrer le « fond mazout » vers un “fond renouvelables” permettant de mettre de l’électricité solaire directement à disposition d’allocataires sociaux et à moindre coût.
- Il faut prolonger l’activité de centrales biomasse (pellets) comme celle des Awirs en région liégeoise ; tout en développant les cogénérations.
- Une taxe carbone pour alimenter un fonds d’investissement est également nécessaire (lire notre article Une taxe carbone belge peut s’avérer bénéfique pour l’économie, les ménages et le climat).
Autant de leviers à activer dès aujourd’hui pour limiter une hausse de CO2 en 2025.