Sortie du nucléaire : arrêtons l’ambiguïté

Le Japon fonctionne aujourd’hui sans nucléaire. L’Allemagne a décidé en 2011 d’en sortir et a immédiatement arrêté 8 de ses 17 réacteurs. La Belgique a décidé en 2003 d’en sortir et pourtant, 9 ans plus tard, le gouvernement fédéral n’a toujours pas de plan… Impossibilité ou mauvaise volonté ?

Suite à la catastrophe de Fukushima, les 54 réacteurs nucléaires nippons ont été progressivement mis à l’arrêt, le temps de subir un entretien approfondi. Le dernier réacteur encore en service a été fermé pour maintenance le 5 mai dernier. Ils ne sont pas près de redémarrer, tant l’opinion publique nippone s’avère désormais opposée à cette énergie. La troisième puissance économique mondiale se retrouve donc de facto sans nucléaire. Comment le pays compte-t-il compenser ces 28 % de la fourniture électrique nationale ? Par un recours un peu plus important aux centrales à combustibles fossiles. Par une intégration plus forte de la production éolienne et solaire. Et, surtout, par une réduction de 15 % de la consommation nationale d’énergie. Motivés par ce nouveau leitmotiv national, les citoyens font la chasse aux consommations superflues, adoptent des comportements économes en énergie et s’équipent d’appareils moins énergivores. Le Japon fait preuve d’une forte capacité de résilience.

Suite à Fukushima également, l’Allemagne a fait le choix politique de sortir du nucléaire et met actuellement en place un cadre lui permettant de s’en passer et de miser sur les opportunités économiques du secteur des énergies renouvelables. Comme le démontrent les statistiques énergétiques allemandes, le recours aux centrales au charbon s’est avéré bien moins important que certaines annonces régulièrement répétées dans les media. Certes, l’Allemagne a moins exporté d’électricité et le recours à la lignite a gagné des parts, mais ce sont surtout les productions éolienne et photovoltaïque qui montrent la plus nette progression. Sans oublier la biomasse qui, malgré son effacement dans les statistiques, continue à augmenter sa contribution.

En Belgique, les statistiques de productions électriques  montrent notre très grande dépendance au nucléaire. Cette omnipotence est sans conteste une des causes de l’immobilisme de la politique énergétique belge depuis 9 ans. La loi sur la sortie du nucléaire, votée en 2003, n’est pas remise en cause, mais la mise en oeuvre d’un plan d’équipement fidèle à cette volonté politique semble difficile. Un rapport fédéral a récemment suscité la polémique, laissant entendre que la fermeture de trois réacteurs (prévue en 2015) pourrait occasionner une pénurie d’électricité sur le réseau. Plusieurs associations (Test-Achat, Greenpeace, WWF,…) ont aussitôt critiqué « un rapport incomplet » et contesté l’argument récurrent de la sécurité d’approvisionnement. Cette menace, brandie depuis 9 ans par les partisans du nucléaire, repousse sans cesse une action politique sans ambiguïté. Pourtant le message de l’Europe est clair. Au travers de sa road map pour 2050, les énergies renouvelables atteindront 40 à 62 %. Comme nous le rappelions dans le focus du mois de janvier 2012, il est grand temps que le politique se saisisse des leviers règlementaires et fiscaux dont il dispose pour accompagner cette transition.