Pompe à chaleur : A la recherche de la combinaison performante

La pompe à chaleur (PAC) est sans conteste une technologie qui peut contribuer à accroitre la performance énergétique des bâtiments. En particulier, elle excelle dans la récupération et le transfert de chaleur de faible écart de température.

La combinaison PAC avec un système d’appoint trouve aujourd’hui une place de choix dans des bâtiments exemplaires. De plus, la PAC donne vie à des processus novateurs de valorisation de potentiels thermiques jusque-là négligés.

En effet, deux événements récents mettaient en lumière la diversité des applications dans lesquelles les pompes à chaleurs peuvent se démarquer comme une solution d’efficacité énergétique pour les besoins de chauffage.

A Namur, le Facilitateur Pompe à chaleur de Wallonie organisait le 2 décembre dernier un séminaire technique sur « La pompe à chaleur : un système universel de récupération et de transfert de chaleur ».

Tandis qu’à Bruxelles, le service Facilitateur Bâtiment durable de Bruxelles-Environnement organisait le 7 décembre dernier un workshop « pompes à chaleur » à la Philanthropy house, Bâtiment Exemplaire qui intègre cette technologie.

Ces deux rencontres ont notamment donné des retours d’expérience pour les applications dans le secteur tertiaire. L’accent est mis ici sur le concept énergétique adapté à la rénovation d’un bâtiment dans lequel la PAC peut s’intégrer avantageusement. Sur base d’exemples concrets amené par les participants, le workshop bruxellois a permis de partager des expériences concrètes d’intégration de la pompe à chaleur dans des bâtiments de bureau, depuis la conception jusqu’au suivi après mise en oeuvre.

La PAC se positionne dans la valorisation des calories environnantes et son recours peut s’avérer particulièrement attrayant dans la récupération de chaleur fatale de certains procédés ou de la chaleur de certains rejets. Ainsi, les pompes à chaleur se déploient au sein d’applications très variées et parfois peu conventionnelles comme le traitement des eaux résiduaires, la climatisation des piscines, les serres agricoles ou les groupes frigorifiques.

Au service de la flexibilité électrique ?

On le voit, la PAC s’inscrit aujourd’hui davantage dans une démarche moins focalisée sur le chauffage pur et simple que sur des démarches orientées d’utilisation rationnelle de l’énergie (URE), voire de flexibilité du réseau électrique. Pour ce dernier point, la combinaison avec une production électrique photovoltaïque attire les prosumers soucieux d’accroître leur taux d’autoconsommation.

La PAC doit généralement opérer en régime constant pendant ses périodes de fonctionnement. Sa participation à la flexibilité nécessite dès lors une régulation adaptée prévoyant les périodes favorables pour la consommation d’électricité de son fonctionnement. Les capacités de flexibilité du système seront renforcées avec l’inertie du bâtiment, les capacités de stockage de la chaleur (eau chaude) ou de froid (eau glacée ou stockage par changement de phase). Enfin, les participants ont rappelé qu’au démarrage du compresseur de la PAC, la puissance électrique appelée peut être 7 fois plus importante que la puissance nominale.

Intégrer la PAC dans des Bâtiments Exemplaires

©Architecte : Greenarch – Photo : Y. Glavie

Le workshop bruxellois a aussi été l’occasion de présenter les résultats de réalisations concrètes découlant de BATEX (Bâtiments exemplaires), comme la Philanthropy house (photo ci-dessus).

La démarche du concepteur a été au centre de l’attention de l’exposé. En fait, la pompe à chaleur n’était pas l’objectif de départ de la rénovation du bâtiment : elle s’est dégagée comme un élément clé faisant partie d’un concept énergétique global. L’ambition étant de rénover un bâtiment existant avec une qualité environnementale et énergétique forte, tout en respectant ses caractéristiques architecturales.

Dans ce type de démarche, la PAC ne s’envisage pas seule. Elle doit être compatible avec les besoins de chaleur et de froid du bâtiment. La clé est avant tout une enveloppe et une étanchéité de qualité qui lui permettent une dimension acceptable des émetteurs de chaleur ayant des régimes de température plus bas (40/35 °C). Elle doit fonctionner dans des conditions qui lui garantissent la meilleure performance : en dessous d’un coefficient de performance (COP) de 2,6 à 2,8, elle n’a simplement pas sa place. Ainsi, dès que la température extérieure descend sous les 5°C, une chaudière à condensation au gaz naturel prend le relais afin de ne pas faire fonctionner la PAC dans une plage où le COP est trop réduit.

La simulation dynamique de la thermique du bâtiment a montré que les besoins de chaleur et de froid du bâtiment n’étaient pas simultané (graphique ci-dessous). Ce qui permet de pouvoir utiliser une PAC réversible pour assurer les deux fonctions énergétiques. La PAC peut fonctionner en mode chauffage ou en mode refroidissement pour autant qu’elle soit associée à un système d’émission qui, lui aussi, soit réversible. C’est ainsi que le projet a fait le choix de plafonds rayonnants ouverts réversibles permettant l’émission de chaleur en période de chauffe et le rafraichissement en période de surchauffe (présentation complète du projet ).

A la recherche des calories perdues

Le workshop wallon s’est penché sur l’application de la PAC dans le cas des stations d’épuration. Ici,  un bilan énergétique des eaux entrantes « froides » (10°C en moyenne) et des eaux sortantes réchauffées par le procédé d’épuration (28°C en moyenne) permet de calculer, sur base des débits, la quantité d’énergie mise en œuvre. Ainsi, par exemple, avec ce différentiel de 18°C et un débit de 100 m³/j, la perte nette de chaleur est de l’ordre de 1.800.000 kcal, soit 2.100 kWh d’énergie thermique.

Sur base annuelle, cela correspond grosso modo à l’équivalent de la chaleur de combustion de 52.000 litres de mazout de chauffage et une émission de135 tonnes de CO2 rejetés dans l’atmosphère. C’est ce constat qui a poussé la société AAQUA – spécialisée notamment dans l’épuration industrielle – à développer un système de récupération de chaleur (photo ci-dessous). Une application idéale pour la pompe à chaleur qui, pour des besoins de chaleur à basse température, peut offrir une performance énergétique défiant toute concurrence. AAQUA avance des COP pouvant dépasser la valeur de 10 et des temps de retour financiers de moins de 3 ans (en savoir plus).


© AAQUA

Les ressources de la riothermie

Dans le même ordre d’idée, la récupération de la chaleur des eaux usées circulant dans les égouts fait partie des solutions envisageables pour valoriser un autre gisement de chaleur perdue. C’est ainsi que les néerlandophones, très actifs sur la filière, ont baptisée riothermie (riool = égouts) une réalisation innovante, présentée lors de la journée wallonne. Il s’agit d’un système de chauffage pour 95 logements sociaux à Leuven, dont 80% des besoins de chauffage sont aujourd’hui assurés par une pompe à chaleur puisant ses calories dans les eaux usées s’écoulant dans le réseau d’égouts jouxtant l’immeuble.

Le projet concerne un ensemble d’appartements (photo ci-dessous) correctement isolés et chauffés par une chaufferie équipée d’une ancienne chaudière à mazout (1985) dont le remplacement s’imposait. L’égout jouxtant l’immeuble présente un débit d’eaux usées généralement supérieur à 40 m³/h et une température de 20°C tout au long de l’année (sauf en période de forte pluie ou lors d’un épisode prolongé de gel, auquel cas elle peut descendre jusqu’à 5°C).

Le nouveau système installé fin 2014 est composé de 2 pompes à chaleur à 3 niveaux de fonctionnement : 50, 100 et 150 kW en fonction de la demande de chaleur. Il est accompagné d’une chaudière gaz qui assure l’appoint de chauffage si nécessaire (spécifiquement durant  les périodes plus froides) et un back-up en cas de défaillance du système. Afin de garantir un bon COP, la température de sortie de la PAC est limitée à 50°C. Si les conditions climatiques le justifient, la chaudière d’appoint permet de fournir le complément nécessaire. Dans ces conditions, depuis son installation (année non complète), le COP moyen mesuré se situe à 3,7 pour l’ensemble de l’installation, y compris les pompes.

L’autre défi du système est l’impact possible des déchets présents dans les eaux résiduaires, en particulier du papier qui a tendance à se mettre en boules et à colmater les équipements. Ces derniers ont imposé un dispositif spécifique pour assurer un nettoyage des échangeurs à plaques, avec un monitoring permanent. Le système, opérationnel depuis fin 2014, n’a pas connu de défaillance.

En tant que projet innovant, l’installation a bénéficié de subsides européens et régionaux, ainsi que de l’intervention d’un tiers-investisseur. Voilà qui devrait donner des idées pour d’autres bâtiments.

Agenda

Signalons ce prochain séminaire : « La pompe à chaleur, du potentiel à Bruxelles ! »

Le 4 mars 2016. Programme et inscription