Partager son électricité verte avec des voisins ? Des projets se préparent en Wallonie Picarde

En Wallonie picarde, 8 communes souhaitent créer des projets locaux d’autoconsommation collective. A Mouscron, une école sera équipée en photovoltaïque et vendra sa production à des ménages locataires du quartier, à un tarif avantageux.

Grâce au cadre légal adopté par le Gouvernement wallon en mars 2019, des projets d’autoconsommation collective comment à émerger un peu partout en Wallonie.

Plusieurs voisins (ménages, entreprises, institutions) peuvent désormais consommer une même production locale d’électricité verte, à un tarif plus avantageux, ce qui répond à une réelle demande des citoyens, entreprises et autorités locales (lire notre article La Wallonie instaure les communautés d’énergie renouvelable).

Cette dynamique permet donc de booster la consommation locale d’énergies renouvelables, grâce à un partage intelligent de la production. A titre d’exemple, un prosumer qui consomme peu d’électricité en journée, alors que son installation photovoltaïque en produit justement beaucoup, peut désormais la vendre à des consommateurs du même quartier, qui en ont précisément besoin en journée.

Ces Communautés Locales d’Energies renouvelables ouvrent de nouvelles perspectives dans la transition énergétique, et la Wallonie s’avère plutôt innovante en la matière.

L’autoconsommation collective pose bien sûr de nombreuses questions concrètes, auxquelles les acteurs de terrain devront répondre : Qui va installer et financer les câbles ? A quel prix vendre et acheter l’électricité locale ? Comment gérer le comptage des consommations et la facturation ? Comment assurer la fiabilité et la sécurité d’approvisionnement ? Comment financer le micro-réseau local ? etc (lire notre article Comment vendre son électricité solaire à son voisin ?).

La Wallonie picarde entre en phase concrète

En Wallonie picarde, les intercommunales Ideta et IEG, la COOPEM (Coopérative Energie Mouscron) et la société Haulogy se sont d’ores et déjà associés pour développer des cas concrets. Ces acteurs ont baptisé leur projet CoLéCo (Communautés locales d’énergie éco-responsable).

L’objectif est ambitieux : créer, d’ici 2021, 7 micro-réseaux électriques dans les parcs d’activités économiques et, d’ici 2025, une centaine de Communautés locales d’énergies renouvelables en Wallonie picarde. Le territoire, qui compte 23 communes, devrait donc voir émerger plusieurs Communautés dans chaque commune.

Huit communes se sont d’ores et déjà engagées dans ce mouvement : Antoing, Brunehaut, Chièvres, Frasnes-les-Anvaing, Lessines, Mouscron, Péruwelz et Pecq.

Des quartiers pilotes ont déjà été identifiés dans chaque commune et des démarches de sensibilisation auront lieu jusque décembre 2019 afin de motiver des citoyens à participer à la construction de Communautés locales d’énergie.

Les volontaires devraient être faciles à trouver puisque, à terme, ils bénéficieront d’une réduction sur leur facture d’électricité (entre 10 et 20%, selon les premières estimations).

C’est à Mouscron que le projet avance le plus vite. Les partenaires peuvent notamment s’appuyer sur l’expertise de la coopérative COOPEM, qui – parmi ses actions emblématiques – a financé l’installation de photovoltaïque chez les citoyens et les entreprises mouscronnois – une première en Wallonie (lire notre article COOPEM : favoriser l’accès au photovoltaïque pour les citoyens et les entreprises !).

Le premier site-pilote est identifié : le toit de l’école Saint-Exupéry, qui sera équipé en photovoltaïque. En journée, la production d’électricité solaire sera consommée en priorité par l’établissement et, en dehors des périodes scolaires (après 16h, le week-end et durant les congés), le photovoltaïque alimentera d’autres consommateurs dans le quartier, typiquement des ménages qui consomment de l’électricité plutôt le soir et le week-end.

La pré-dimensionnement indicatif permet d’envisager le déploiement de 100 kWc, qui couvrirait la consommation annuelle de l’école et environ 20% des besoins annuels cumulés des habitants du quartier.

Le quartier compte environ 200 logements raccordés à la même borne électrique que l’école ; ceux-ci pourraient donc rejoindre la Communauté locale d’Energies Renouvelables (vue aérienne ci-dessous).

La COOPEM a également choisi ce quartier pour ses caractéristiques sociales : il est principalement habité par des locataires. N’étant pas propriétaires, ceux-ci n’ont pas investi dans leurs propres installations photovoltaïques. Mais grâce au projet CoLéCo, ils pourront eux-aussi bénéficier d’une électricité solaire, à moindre coût. C’est l’un des nombreux intérêts de l’autoconsommation collective.

En outre, des conseillers accompagneront les ménages participants en vue de déplacer leurs consommations électriques au moment des pics de production.

Schéma indicatif du projet d’autoconsommation collective autour de l’école Saint-Exupéry à Mouscron. Source : COOPEM.

Le quartier du Nouveau Monde à Mouscron est également prospecté pour y développer un projet similaire.

Tester un logiciel de facturation

Le projet CoLéCo permettra également de tester un logiciel de facturation dédié à l’autoconsommation collective.

En effet, la PME wallonne Haulogy, spécialisée dans l’édition de logiciels de facturation destinés aux gestionnaires de réseaux et fournisseurs d’énergie, développe actuellement un logiciel spécialement conçu pour la gestion des facturations auprès des différents consommateurs d’une Communauté Locale d’énergie. Le partenaire testera son logiciel, en situation réelle, dans les Communautés qui émergeront dès 2021 en Wallonie picarde.

Concrètement, les différents participants à la Communauté signeront une convention juridique qui déterminera les clés de répartition de production et de consommation d’énergie entre eux, le solde étant fournit par le réseau électrique. Chaque consommateur recevra donc deux factures : une pour la consommation d’électricité au sein de la Communauté (à prix avantageux) et une autre pour la consommation d’électricité fournie par le réseau (au tarif du fournisseur).

Cette expérience de terrain stimulera certainement d’autres projets d’autoconsommation collective, en Wallonie et même en Europe.