Pour devenir le premier continent « Zéro carbone » d’ici 2050, l’Europe compte réviser et réunir de nombreuses Directives au service de sa stratégie climatique. Les Etats-membres suivront-ils la même ambition ?
La nouvelle Commission européenne a présenté en décembre dernier son Pacte vert pour faire de l’Europe le premier continent « Zéro carbone » d’ici 2050 (lire notre article L’Europe retrouve de l’ambition climatique).
Cette stratégie ambitieuse, également soutenue par le Parlement européen, suscite un regain d’espoir et de dynamisme parmi les acteurs de la transition énergétique. Pour ne pas décevoir, la Commission européenne doit à présent préciser les modalités de mise en œuvre et surtout réussir à convaincre les Etats-membres d’implémenter les mêmes ambitions dans leurs politiques nationales et régionales. Au vu des politiques climatiques très inégales – notamment en Belgique -, chaque Etat va donc soutenir ou freiner le processus au sein du Conseil européen. Mais, globalement, ils devront se mettre en phase avec cette stratégie.
Tous les acteurs de l’énergie durable travaillent désormais au niveau des gouvernement nationaux afin d’orienter un consensus général autour de ce Pacte vert.
La Commission européenne en a précisé la feuille de route lors d’une séance d’information le 28 janvier dernier auprès des acteurs européens, dont voici les grandes lignes.
Concrètement, la Commission européenne ouvre un processus législatif large, intense et ambitieux, en vue de réussir son pari. L’agenda 2020-2021 s’annonce très soutenu, avec la révision de toutes les Directives européennes en vue de soutenir cette stratégie climatique.
Notons d’abord que ce Green deal européen change de discours et de méthode : on ne fait plus cohabiter des stratégies climatiques, énergétiques, environnementales, industrielles et économiques (pas toujours cohérentes entre-elles), mais on réunit le tout dans une seule vision à long terme. Autrement dit, la transition écologique n’est plus traitée en silo, mais de façon systémique. Et c’est déjà une avancée notable.
Croissance verte
Néanmoins, l’objectif principal reste de stimuler la croissance, l’emploi et l’innovation, tout en atteignant nos objectifs climatiques et environnementaux. On reste donc ici dans le concept classique de « croissance verte » dont la capacité à répondre aux enjeux environnementaux est pourtant mise en doute pas un nombre grandissant d’experts (lire par exemple cette étude de l’Institut belge du Développement Durable et notre article Territoires et Climat : la transition sera d’abord culturelle).
Pas de décroissance volontaire donc, mais « une économie du bien-être et régénérative, qui donne plus aux gens et à la planète que ce qu’elle ne leur a pris », selon l’expression utilisée lors de cette présentation officielle.
Cette stratégie globale se décline en plusieurs dizaines de sous-stratégies, qui seront présentées et détaillées dans le courant de l’année 2020 par la Commission.
Voici l’agenda prévu pour la thématique « Une énergie propre, abordable et sûre » :
- Évaluation des plans nationaux définitifs en matière d’énergie et de climat – Juin 2020
- Stratégie pour une intégration intelligente des secteurs – 2020
- Initiative « vague de rénovations » pour le secteur de la construction – mars 2020
- Évaluation et révision du règlement sur le réseau transeuropéen d’énergie – 2020
- Stratégie relative à l’éolien en mer – 2020
Chaque Directive fera l’objet d’un long processus de négociations avec les Etats-membres au sein du Conseil européen.
Une fois les législations et les stratégies adoptées, il faudra aussi connaitre leur contenu et être attentif à leur mise en œuvre. Les acteurs de terrain savent qu’une bonne Directive, correctement transposée au niveau national, peut considérablement accélérer la transition énergétique.
Reste à voir si la Commission européenne sera cohérente avec elle-même, notamment dans le cadre des accords commerciaux, ou encore dans le financement de certains projets de développement économique plutôt basés sur les énergies fossiles, à travers notamment les fonds Feder.
Se pose également l’enjeu crucial du financement du Pacte vert, qui doit mobiliser au moins 1 000 milliards d’euros d’investissements durables dans les dix années à venir. La Commission a récemment précisé les mécanismes de financement prévus (lire ce communiqué).
A ce stade, les observateurs se montrent prudents mais plutôt positifs sur les capacités réelles de l’Europe de se doter des outils financiers nécessaires à sa stratégie (lire par exemple cette analyse : Europe : le Green deal sera-t-il à la hauteur des enjeux ?).
Cependant, le Parlement européen a adopté le 14 février denier une liste de projets énergétiques, dont 32 infrastructures gazières, en contradiction complète avec les ambitions du Green deal, ce qui pose question (lire cet article : Le Parlement européen approuve les projets énergétiques controversés de l’UE).
Lire également nos articles :
Comment financer la transition énergétique en Europe
Energie durable : l’Europe se donne une ambition pour 2030
L’Europe encourage la mobilité électrique et l’autoconsommation collective