Une étude réalisée par Climact analyse les besoins d’électrification de la mobilité en Belgique et ses impacts dans les pays d’extraction minière. Pour une transition juste, les acteurs belges sont appelés à développer les transports collectifs et l’économie circulaire.
La mobilité en Belgique et en Europe va connaître de profonds changements : Moins de kilomètres, moins de voitures et (beaucoup) plus de vélos et de transports collectifs et partagés. Mais ce qui circulera sera électrique et 100% renouvelables (lire notre article Pourquoi la voiture électrique ne résoudra pas notre mobilité …mais jouera un rôle déterminant).
De nombreux acteurs belges préparent cette transition et une étude de référence a été publiée fin 2021 sur les besoins d’électrification de la mobilité en Belgique et ses impacts économiques, sociaux et environnementaux. Cette étude, réalisée par le bureau d’étude Climact pour le compte du Conseil fédéral du Développement durable, analyse trois scénarios pour une mobilité décarbonée en Belgique d’ici 2050.
Au vu notamment des impacts dans les pays miniers et de la rareté de certains métaux, les acteurs de la mobilité électrique en Belgique et en Europe sont appelés à s’engager dans les scénarios les plus ambitieux en matière de transports collectifs et d’économie circulaire.
Nous développons ici cet enjeu essentiel.
Trois scénarios Zéro carbone
L’étude a réalisé trois scénarios pour une mobilité décarbonée en Belgique d’ici 2050 :
- Un scénario (baptisé “BEH”) qui intègre des changements majeurs de comportement, tels qu’une réduction de la demande : moins de voitures et un plus grand usage des transports publics et du vélo.
- Un scénario intermédiaire (“CORE 95”) qui combine des changements de comportements et un développement technologique (moins prononcés que dans les deux autres scénarios).
- Un scénario (“TECH”) qui développe fortement les technologies : efficience énergétique, vecteurs énergétiques innovants (hydrogène, fuels synthétiques), …
Premier constat : Les trois scénarios anticipent une croissance importante de la demande en batteries (voir graphique ci-dessous).
Deuxième constat : Les trois scénarios tablent sur une diminution – plus ou moins forte – des besoins annuels en voitures en Belgique d’ici 2050 (moins de voitures mises en circulation) ; ainsi que sur une forte croissance des véhicules électriques entre 2020 et 2030.
Sur le graphique ci-dessous, le scénario “BEH” projette une très forte diminution de l’usage de voitures individuelles (-84%), le scénario intermédiaire “CORE 95” prévoit également une diminution importante (-55%) ; mais moins importante dans le scénario “TECH” (-29%).
Selon les auteurs, plus on joue sur la demande, plus cela facilite le défi industriel de la décarbonation des ventes.
Réduire la pression sur les ressources minières
Ces scénarios permettent également d’évaluer le besoin et la pression sur les ressources minières, notamment pour la fabrication des batteries.
L’étude a analysé l’impact des trois scénarios sur les besoins de six minéraux critiques : cobalt, lithium, graphite, nickel, manganèse, aluminium.
Mais, ici aussi, elle envisage deux scénarios :
- Le scénario “CIRC” (pour “circulaire”) table sur une forte ambition de recyclage et d’amélioration technologique des batteries.
- Le scénarios “LIN” (pour “linéaire”) table sur un recyclage similaire aux pratiques actuelles et des améliorations technologiques moins importantes ou moins rapides.
Le graphique ci-dessous ajuste le scénario de décarbonation “CORE 95” avec les variables “CIRC” et “LIN” (“Hybrid” étant une trajectoire intermédiaire).
Comme on peut le voir, le scénario qui mise fortement sur l’économie circulaire (réutilisation, réparation, recyclage) diminue fortement les besoins en minéraux.
Quels impacts dans les pays d’extraction ?
Derrière ces chiffres et trajectoires, se cachent des réalités autrement plus impactantes pour les habitants et l’environnement des pays où ont lieu ces extractions minières.
Lors du webinaire de présentation de cette étude (en replay ici), l’association CNCD.11.11.11 a en effet rappelé les nombreux impacts locaux sur :
- L’environnement : pertes de biodiversité, pollution de l’air, de l’eau et du sol, empreinte climatique, pénurie d’eau, …
- Les droits humains et sociaux : contraintes sur l’accès à la santé et à l’eau, non-respect des droits à un travail décent et sécurisé, accidents et catastrophes, déplacements forcés, violences, pertes de revenus, insécurité alimentaire, …
Or la transition énergétique en Europe ne peut se faire au détriment des écosystèmes et populations ailleurs dans le monde.
En toute logique, le CNCD.11.11.11 et de nombreuses autres ONG plaident pour une transition écologique qui réduise les besoins de minéraux : moins de voitures au profit des transports en commun et du vélo, efficience et recyclage des matériaux, usage prioritaire des minéraux pour la transition verte (et non l’industrie traditionnelle), …
Les ONG plaident également pour le respect des droits humains et de l’environnement, sur base d’une législation et de la responsabilité des entreprises et sur une réglementation du secteur minier aux niveaux international et local.
Or l’Europe s’engage actuellement dans un modèle vertueux d’économie circulaire et adoptera bientôt une législation qui se veut exemplaire et contraignante en matière de respect de l’environnement et des droits humains, depuis les mines d’extraction des matières premières jusqu’au recyclage. Amnesty International soutient l’initiative mais demande de combler d’importantes lacunes.
Au vu notamment de ces impacts dans les pays miniers et de la rareté de certains métaux, les acteurs de la mobilité électrique en Belgique et en Europe sont appelés à s’engager dans les scénarios les plus ambitieux en matière de transports collectifs et d’économie circulaire.
Notons que l’étude Climact aborde d’autres enjeux, et notamment l’emplois (lire notre article La voiture électrique devra également gagner la bataille de l’emploi).
Nous vous invitons à lire également les articles suivants :
Eolien et voitures électriques : comment réduire les besoins de matériaux critiques ?
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