L’industrie peut désormais atteindre le zéro carbone

Une révolution industrielle est en marche ! En Suède, des industriels investissent massivement dans la production d’acier zéro carbone, grâce à l’hydrogène vert. Tandis que les Emirats Arabes Unis seront le premier pays à produire de l’aluminium à partir de l’électricité solaire. 

Jusqu’à présent, les industries du métal et du béton, très émetteurs de CO2, étaient considérées comme très difficiles à décarboner. 

Avec l’émergence de nouvelles technologies, cette situation pourrait rapidement changer. 

Selon une étude récente de Agora Energiewende – institut allemand de référence sur la transition énergétique -, ces nouvelles technologies décarbonées pourraient permettre aux industries de l’acier, du ciment et de la chimie d’atteindre à elles seules les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre du secteur industriel dans le système européen d’échange de quotas d’émission pour 2030.  

L’industrie sidérurgique pourrait ainsi réduire d’ici 2030 ses émissions d’un tiers (pour des émissions de 188 millions de tonnes de CO₂ en 2017) en remplaçant désormais les hauts fourneaux au charbon arrivant en fin de vie par des installations de réduction directe. Ces installations peuvent fonctionner dans un premier temps au gaz naturel, puis passer à l’hydrogène vert lorsqu’il sera disponible. 

Dans les usines chimiques, les chaudières à vapeur actuellement alimentées au gaz naturel peuvent désormais être électrifiées ; avec un mix électrique européen qui deviendra beaucoup plus propre en 2030. Selon les calculs de Agora Energiewende, l’industrie chimique pourrait ainsi réduire ses émissions de CO₂ d’un cinquième.  

Enfin, dans les cimenteries, ce sont les combustibles biomasse et les infrastructures de capture et de stockage du carbone (CCS) qui permettront à ce secteur de réduire ses émissions de CO2

Selon l’institut allemand, ces technologies clés sont cependant souvent négligées dans le débat européen. L’Europe met ainsi en péril ses objectifs climatiques à long terme (lire l’étude en anglais et le communiqué en français). 

Pour illustrer ces nouvelles solutions, voici deux initiatives remarquables, suédoise et émiratie. 

 

La Suède investit dans l’acier zéro carbone 

 

En Suède, l’entreprise publique LKAB, qui produit environ ¾ du minerai de fer européen, a annoncé en novembre dernier un investissement massif (39,2 milliards d’euros) pour transformer son process industriel d’ici 2045 en vue de produire un acier zéro carbone.  

LKAB s’est associé au sidérurgiste SSAB et à l’électricien Vattenfall au sein du consortium Hybrit afin de développer une chaîne de production décarbonée. 

Dans le process actuel, les boulettes de minerai (contenant le fer) sont fondues avec du coke (un dérivé du charbon) dans des haut-fourneaux très polluants.  

Cette étape sera à terme remplacée par le procédé dit de “réduction directe” : de l’hydrogène vert – produit par électrolyse de l’eau avec des sources d’énergies renouvelables – réagit à l’oxyde de fer pour former de l’eau (et non plus du dioxyde de carbone). Le fer est ensuite fondu dans des fours à arc électrique, alimentés ici aussi par des énergies renouvelables. Il en résulte des “éponges” de fer qui serviront à la fabrication d’un acier zéro carbone (voir illustration ci-dessous). 

Plus besoin de hauts-fourneaux ! 

 

Le consortium Hybrit a d’ores et déjà créé une usine pilote à Lulea, au Nord de la Suède, et testera ce process en vue produire de l’acier zéro carbone en 2026. 

A terme, la capacité d’électrolyse devrait atteindre 10 GW ! 

(pour en savoir plus, consulter la brochure de Hybrit et ces articles de Forbes et Energypost.eu). 

 

Les Emirats Arabes Unis investissent dans l’aluminium solaire

 

Autre initiative récente : Les Emirats Arabes Unis ont annoncé en janvier 2021 qu’ils seront le premier pays du monde à produire de l’aluminium à partir d’énergie solaire. 

En effet, un accord a été trouvé avec la Dubaï Electricity and Water Authority (DEWA), qui fournira 560 GWh par an à partir de sa gigantesque centrale solaire – Mohammed bin Rashid Al Maktoum Solar Park – au groupe métallurgique Emirates Global Aluminium (EGA). 

Ce deal permettra de produire 40.000 tonnes d’aluminium zéro carbone durant la première année, puis la production sera augmentée en vue d’une exportation de grande envergure. 

Selon ces industriels, la demande mondiale pour des matériaux zéro carbone est en forte croissance, les marchés souhaitant répondre aux objectifs climatiques légaux ou “corporate”. 

Le procédé de fabrication de l’aluminium consomme de très grandes quantités d’électricité pour l’électrolyse (illustration ci-dessous). Selon le mix électrique du pays de fabrication, les émissions de CO2 peuvent être très élevées. 

Dans le cas des Emirats Arabes Unis, l’électricité sera solaire et donc sans émissions de carbone. 

L’électricité consommée sera tracée et certifiée selon le système international de certification des énergies renouvelables. 

La fabrication de l’aluminium demande de grandes quantités d’électricité. Schéma : EGA.

Selon Abdulnasser Bin Kalban, CEO de EGA, “l’aluminium est un métal léger, résistant et infiniment recyclable et ces propriétés signifient que, en tant que matériaux, il joue un rôle global vital dans le développement d’un futur soutenable. Cependant, il faut aussi considérer de quelle manière durable cet aluminium est fabriqué.” (lire ce communiqué). 

Le Solar Park de Dubaï (illustration ci-dessous) compte déjà une capacité de 1GW et devrait atteindre 5 GW d’ici 2030, utilisant un mix technologique composé de photovoltaïque et de centrales solaires thermodynamiques (CSP).