Le scénario des ONG pour une Belgique durable en 2030

Les ONG environnementales redonnent de l’ambition à la politique belge. Selon l’étude « Our energy future 2016 », la Belgique peut atteindre, en 2030, 58 % d’énergie renouvelable dans la consommation finale électrique belge.

La Belgique est face à un défi énergétique important. Il est urgent de s’accorder sur une vision énergétique commune pour la Belgique. Les acteurs du secteur de l’énergie, les entreprises et la société civile demandent avec insistance, voire impatience, un pacte énergétique pour la Belgique pourtant promis par la Ministre Marghem en début de législature (lire notre article Pacte énergétique belge : impatience à tous les étages). Quelle déception de voir que ce point ne figure pas parmi les priorités 2017 du Gouvernement fédéral annoncé ce début janvier 2017.

Sur base d’une récente étude technico-économique, les ONG environnementales – IEW, WWF, BBL et Greenpeace – proposent un scenario pour le secteur électrique belge intitulé « Our energy future 2016 – En route pour un système énergétique belge basé sur le renouvelable ». Elles ont mandaté le centre de recherche 3E pour construire un scénario électrique pour la Belgique, la Flandre et la Wallonie. Cette étude a été présentée ce 16 décembre 2016.

« Sortir du nucléaire et atteindre les objectifs de Paris, c’est possible »

Le scenario s’inscrit dans un objectif qui donne la priorité au Climat, prévoit la sortie du nucléaire et vise « un futur énergétique ambitieux, flexible et 100% renouvelable ».

Le scenario identifie un optimum technico-économique basé sur un modèle dynamique intégrant les données les plus récentes en termes d’évolution des marchés de l’énergie. « Tout change très vite dans le secteur de l’énergie », constatent les ONG. « Les projections de coût des renouvelables ont fort baissé. L’éolien en mer, par exemple, atteint aujourd’hui des coûts inimaginables il y a seulement 3 ans. »

Pour la première fois, le scénario « Our energy future » a été divisé en objectifs fédéraux et régionaux, dans la mesure où l’essentiel des compétences en matière d’énergie est du ressort des Régions. Le scénario confirme l’urgence de doter la Belgique et les trois Régions d’objectifs ambitieux dans trois secteurs clés : l’efficacité énergétique, l’éolien et le photovoltaïque. Leurs coûts de moins en moins élevé en font l’option la moins coûteuse pour répondre aux besoins énergétiques de nos sociétés et pour s’inscrire efficacement dans les engagements de l’Accord de Paris. Par ailleurs, elles créent des emplois non-délocalisables.

Le scenario indique que la transition énergétique vers 100% d’énergie renouvelable est possible tant d’un point de vue technique qu’économique. Il propose d’accélérer le rythme dès à présent. En réactivant la dynamique d’installation du solaire photovoltaïque (+ 300 à 1000 MW par an), de l’éolien sur terre (+ 341 MW par an), en créant une nouvelle zone de concession pour l’installation d’éoliennes en Mer du Nord et en limitant l’usage de la biomasse dans des unités de petites puissances permettant la cogénération.


Graphique : Evolution des capacités photovoltaïques en Belgique entre 2007 et 2030

La Belgique dispose d’un grand potentiel énergétique de flux renouvelables solaires et éoliens : 2,5% du territoire belge (800 km²) équipé de photovoltaïque ou 10% du territoire belge (3.000 km²) avec une présence éolienne (cinq éoliennes par km²), produiraient chaque année l’équivalent de la consommation électrique belge (80 TWh). Selon l’ABC de l’énergie durable, le potentiel énergétique renouvelable est donc bien présent en Belgique.

Le caractère ambitieux du scenario réside dans le rythme d’installation des équipements renouvelables qu’il propose dès aujourd’hui. Il nécessite de créer des conditions favorables à un changement de mode gestion et d’intégration de ces systèmes renouvelables dans le réseau électrique, dans nos paysages et dans nos habitudes énergétiques. Pour lui permettre de se développer, la volonté et l’action politique sont des conditions sine qua none. L’étude propose des recommandations qu’elle adresse au fédéral et aux Régions.

Pour la Belgique, il est urgent de conclure un accord énergétique ambitieux, de développer un système électrique renouvelable et flexible, d’augmenter le prix du CO2 et d’améliorer la sécurité et la flexibilité de l’approvisionnement électrique.


Graphique : L’éolien terrestre en Belgique depuis 2000, avec une projection jusqu’en 2030

Pour la Flandre, l’étude recommande de la transparence et de la participation, des objectifs flamands ambitieux (La Flandre peut atteindre 49% d’énergie renouvelable dans la consommation finale d’électricité régionale en 2030), des mesures ciblées d’efficacité énergétique et un plan d’action pour le solaire photovoltaïque. Elle préconise également d’accélérer le développement de l’éolien, de limiter le recours à la biomasse pour la production électrique, de veiller à un cadre stable pour les investissements dans les renouvelables, de renforcer les actions d’efficacité énergétique et de travailler de concert avec les autres niveaux institutionnels belges.

Pour la Wallonie, l’étude recommande de se mettre en ligne avec le défi climatique, de développer une politique coordonnée d’efficacité et de sobriété énergétique, de revoir l’ambition renouvelable à la hausse (en 2030, 15.040 GWh d’électricité renouvelables représenteraient 79% de la consommation finale d’électricité régionale), de développer la biomasse (dans les mêmes quantités mais autrement), de redonner confiance au solaire photovoltaïque, de débloquer l’éolien, de sortir de son île énergétique.


Tableau : Comparaison des objectifs du scenario des ONG environnementales et des objectifs du Gouvernement wallon (Cap Gemini). Source APERe.

A ce sujet, rappelons la position d’Inter Environnement Wallonie adoptée en octobre 2016. L’association revendique des objectifs renouvelables wallons bien plus ambitieux. « Les projections insuffisantes de développement des énergies renouvelables prévues par le Gouvernement wallon (8000 GWh en 2026) et l’absence d’une véritable stratégie de baisse de la consommation d’électricité hypothèquent gravement l’opportunité pour notre Région de se positionner comme un leader de la transition énergétique ».