En Wallonie, même sans prime Qualiwatt, l’investissement photovoltaïque reste plus intéressant qu’un compte épargne. Mais avec la fin prévue de la compensation, le prosumer devra booster son autonomie solaire afin de garder une bonne rentabilité économique.
Le Gouvernement wallon a pris sa décision le jeudi 21 décembre : les primes Qualiwatt s’arrêteront le 30 juin 2018. C’est en soi une bonne nouvelle : le photovoltaïque résidentiel wallon n’a plus besoin de prime pour être rentable.
En effet, la filière a connu une chute des prix spectaculaire ces dernières années (lire notre article 2017 ou la victoire économique du solaire et de l’éolien). Un ménage belge peut aujourd’hui équiper son toit d’une installation de 3 kWc pour 4 à 5.000 €.
Voici 10 ans, au démarrage de la filière en Europe, la même installation coûtait entre 18.000 € et 20.000 €, ce qui justifiait à l’époque la mise en place de mécanismes de soutien : certificats verts, primes, réductions fiscales …
Aujourd’hui, l’investissement est rentabilisé en quelques années, même sans prime. Le prosumer bénéficie ensuite d’une électricité solaire gratuite, et réduit ainsi largement ses factures d’électricité.
Cet investissement reste aussi très intéressant si vous avez de l’argent qui dort sur un compte épargne …qui ne rapporte presque plus rien.
Boostez votre autonomie solaire ?
Cependant, un autre élément jouera bientôt sur la rentabilité économique des installations photovoltaïques : la mise en place d’un tarif prosumer qui entrera en vigueur au 1er janvier 2020. Il a été calculé pour équivaloir à la fin de la compensation sur la partie réglementée en tenant compte d’une autoconsommation forfaitaire de 37,37% et d’une production de 910 kWh/kWc (voir méthodologie de la CWAPE + FAQ ).
Ce tarif n’incite pas à un changement de comportement et à maximiser son auto-suffisance. Il est néanmoins possible d’installer un compteur double flux qui comptabilise les deux flux d’électricité. Dans ce cas, la compensation n’est plus d’application et le prosumer devra d’une part, payer l’électricité prélevée du réseau comme tout autre consommateur et, d’autre part, revendre l’électricité excédentaire à un fournisseur d’énergie. Dans ce cas là, le prosumer aura tout intérêt à booster son autonomie solaire, c-à-d à consommer l’électricité au moment où ses panneaux produisent le plus, en programmant ses appareils électro-ménagers au bon moment. Pour s’y habituer, il trouvera des prévisions photovoltaïques et des conseils sur le site Va vers le soleil.be.
Pas de dérapage possible pour la prime 2018
L’annonce de l’arrêt des primes Qualiwatt provoquera-t-elle un boom d’installations d’ici fin juin ? C’est probable mais cela n’induira pas de dérapage financier, comme ce fut le cas avec les certificats verts wallons. En effet, le mécanisme Qualiwatt est plafonné à 12.000 primes par an. Or, depuis l’instauration du système voici 4 ans, à peine 17.342 primes ont été distribuées au total.
En 2018, les 12.000 primes annuelles pourront être toutes distribuées d’ici fin juin. Le mécanisme est donc sous contrôle et ne dépassera pas les montants prévus.
Mais cette annonce sera-t-elle bien comprise ?
La filière photovoltaïque wallonne a souffert ces dernières années d’un manque de communication positive. Les politiques s’en sont tenus à annoncer la diminution ou la fin d’un régime d’aide sans en expliquer le contexte : chute des prix des panneaux solaires, amélioration des performances photovoltaïques, augmentation prévisible des factures d’électricité, contribution au bon fonctionnement du réseau, …
Par conséquent, les Wallons sous-estiment la rentabilité des installations photovoltaïques, même sans soutien. Le constat est identique à Bruxelles (lire notre article Les Bruxellois sous-estiment les avantages du photovoltaïque).
La Flandre, qui n’accorde plus de soutien (autre que la compensation) depuis 2015, assure au contraire une réelle communication sur les avantages du photovoltaïque. Dès lors, les ménages flamands continuent à s’équiper, car l’investissement reste rentable par rapport 1) au prix d’achat de l’électricité auprès d’un fournisseur 2) aux faibles taux d’intérêt sur les comptes épargne.
En Flandre, suite à la suppression du soutien, les installateurs ont par ailleurs diminué leurs prix car ils ne devaient plus se charger des démarches administratives pour l’obtention des certificats verts. Avec la fin de Qualiwatt en Wallonie, il est probable que les installateurs diminueront également leur prix car le travail d’installation s’en trouve facilité.
Si la Wallonie veut réellement assurer la place du solaire dans son mix électrique, elle devra elle aussi renforcer sa communication positive auprès du grand public.
Et la qualité ?
Un des atouts du mécanisme Qualiwatt était de conditionner la prime à des exigences de qualité portant sur les panneaux et sur leur pose (certification, normes, label NRQual PV, …).
Avec la fin de Qualiwatt se pose donc la question de la qualité des installations qui seront posées à partir du 1er juillet 2018. Une communication sera nécessaire pour inciter les ménages à demander plusieurs devis et comparer, non seulement les prix et les technologies proposées, mais aussi les références sur la qualité.
On peut néanmoins rassurer les ménages car, selon la Renewable Energy Platform, le secteur s’est fortement assaini depuis le boom de 2012 et assure désormais une bonne qualité quasi généralisée.
La meilleure démarche consiste à faire appel à une entreprise labellisée NRQual PV, certifiée, contrôlée et auditée par un organisme labellisateur reconnu. Ce label sera maintenu, même sans Qualiwatt.
Rendre le photovoltaïque obligatoire ?
La directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments impose qu’à partir de 2021, tous les nouveaux bâtiments devront présenter une consommation énergétique quasi nulle.
Ces bâtiments « Quasi Zéro Energie » seront passifs ou basse-énergie et devront couvrir leurs besoins en énergie par une production d’énergie renouvelable sur place ou à proximité.
En Belgique, la Flandre a pris des mesures rapides pour anticiper cette obligation européenne. Depuis le 1er janvier 2014, les nouveaux projets de construction en Flandre doivent répondre à des normes énergétiques beaucoup plus strictes. Le candidat bâtisseur doit par ailleurs équiper son logement avec l’une de ces technologies :
- un boiler solaire
- des panneaux photovoltaïques
- une chaudière biomasse
- une pompe à chaleur
A défaut, il peut également choisir d’investir dans un projet collectif tel qu’un chauffage urbain ou un parc éolien participatif.
Si la Wallonie et Bruxelles ont également adopté des normes passives ou basse-énergie pour les nouvelles constructions, elles n’ont pas encore établi de cadre réglementaire pour y intégrer des installations renouvelables. Or cette future obligation facilitera l’intégration des productions renouvelables – notamment le photovoltaïque – dans les bâtiments neufs.
Une nouvelle étape qui nous rapprochera un peu plus du soleil comme source d’énergie propre et inépuisable.