Le nouvel Arrêté « électricité verte » confirme l’octroi de certificats verts à l’incinérateur de Bruxelles, malgré les avis négatifs de toutes les instances de consultation. Pourtant, la biométhanisation serait beaucoup plus performante.
Le gouvernement bruxellois a adopté le 17 décembre dernier un nouvel Arrêté relatif à la promotion de l’électricité verte (lire notre article L’électricité verte change de cadre à Bruxelles). Ce nouveau cadre légal confirme le passage en force d’une mesure contestée : l’octroi de certificats verts à l’incinérateur de Bruxelles-Propreté.
L’idée était annoncée depuis plus d’un an et le législateur a dû trouver ici quelques pirouettes conceptuelles pour justifier ce projet et même déroger aux conditions techniques de base (notamment en ce qui concerne la durée d’octroi de dix ans).
Ces aménagements ont valu au texte des avis négatifs de toutes les instances de consultation : de BRUGEL au Conseil Economique et Social de la Région Bruxelles-Capitale en passant par le Conseil de l’Environnement.
Rien n’y a fait. L’Arrêté confirme l’octroi de certificats verts aux « installations de production d’électricité d’une puissance totale supérieure à 40 MW qui valorisent la chaleur issue de l’incinération de la fraction biodégradable de déchets industriels et ménager ». Une formulation sur mesure pour intégrer l’incinérateur dans le mécanisme de soutien public aux énergies renouvelables.
Or ce projet reste contestable.
Utilisation abusive du mécanisme des certificats verts
Le mécanisme des certificats verts vise à soutenir les nouvelles productions d’électricité verte. Or l’incinérateur existe depuis plus de 30 ans et sa production électrique, amortie depuis longtemps, ne nécessite pas de nouveaux investissements.
Le gouvernement bruxellois a dû élaborer un montage très singulier. Sur base d’une convention entre Electrabel, propriétaire de la génératrice électrique, et Bruxelles Energie (société qui gère la production de vapeur), les revenus générés par les certificats verts seront transférés à Bruxelles Propreté, puis versés au budget régional.
Les professionnels parlent dès lors d’une utilisation abusive du mécanisme afin d’appliquer une taxe déguisée : on évoque 100.000 certificats verts (CV) par an, générant pour la Région un revenu de 8 millions d’euros par an !
Et rien ne dit, au stade actuel, que ce revenu soit alloué au développement des énergies vertes à Bruxelles.
En outre, cet afflux de CV risquait de déséquilibrer le marché régional et faire chuter le prix unitaire. Pour y remédier, le gouvernement bruxellois a dû modifier le quota, qui fait un saut de 4,5% en 2015 à 8,2% en 2016.
En contradiction avec le projet de biométhanisation
Chaque Bruxellois jette en moyenne 280 kg d’ordures ménagères par an. Une source d’énergie à valoriser.
En soi, la valorisation énergétique des déchets ouvre bien des portes pour une ville comme Bruxelles. Voilà bien une ressource qui n’est pas prête à s’épuiser. La Région bruxelloise en produit chaque année plusieurs centaines de millier de tonnes, avec une fraction organique importante : chaque Bruxellois jette en moyenne 280 kg d’ordures ménagères par an.
Depuis quelques années, la collecte sélective des déchets de parcs et jardins a permis une valorisation plus « fine », à travers le compostage réalisé à Forest. Mais le tri sélectif des déchets organiques issus des ménages et du secteur HORECA permettrait d’aller bien plus loin.
Or l’incinération de déchets organiques présente un rendement électrique faible. C’est le mode de « valorisation » énergétique le moins performant, comparé à la biométhanisation par exemple. La biométhanisation des déchets organiques fait d’ailleurs partie des projets envisagés pour Bruxelles. Un projet pilote de collecte de déchets organiques par sacs oranges est en cours dans plusieurs communes de l’agglomération, baptisé « Be Organic ». Les quantités collectées sont actuellement envoyées vers le centre de biométhanisation de Ypres, faute d’un centre opérationnel à Bruxelles.
Si ce test est concluant, un traitement intelligent des flux dégagés pourrait ouvrir la voie à des modes de valorisation plus performants énergétiquement via la biométhanisation.
Cette technologie a déjà fait ses preuves en Europe, mais elle se heurte en milieu urbain à des contraintes particulières (odeurs, charroi, sécurité, etc.) qui restent à surmonter.
Le projet pilote « Be Organic » ouvre la voie à une biométhanisation des déchets organiques bruxellois. Cette valorisation énergétique est bien plus performante que l’incinération.