Les gestionnaires de réseaux européens sont mobilisés pour gérer un événement inédit : une chute temporaire de la production photovoltaïque. Pas de crainte de ce point de vue, l’impact sur le réseau électrique trouve sa réponse dans les procédures classiques d’équilibrage.
La précédente éclipse solaire a traversé l’Europe en 1999, à une époque où la production photovoltaïque était encore marginale. Aujourd’hui par contre, le soleil permet de produire jusqu’à 10% de l’électricité européenne. Et par ailleurs, l’événement se produira un jour de semaine, à un moment de grande consommation électrique.
Ce vendredi 20 mars, en cas de ciel dégagé, le parc photovoltaïque européen (88.000 mégawatts de puissance, selon EPIA) sera soumis à une baisse progressive d’ensoleillement. Il pourrait connaître une baisse de puissance d’environ 35.000 mégawatts – soit l’équivalent de 40 réacteurs nucléaires – pour revenir par la suite progressivement sur le réseau, au fur et à mesure que l’ombre lunaire avancera sur notre continent.
Deux pays sont particulièrement concernés : l’Allemagne et l’Italie, qui comptent deux tiers de la puissance photovoltaïque européenne installée.
L’enjeu pour les gestionnaires de réseau électrique est de répondre à la vitesse de variation de la puissance électrique. Si le ciel est dégagé, l’Allemagne devrait connaître le plus grand taux de variation de puissance (-273 MW/min, +361 MW/min), suivie par l’Italie (-111 MW/min, +159 MW/min).
Chute attendue de la production photovoltaïque (GW) en Allemagne ce vendredi 20 mars, en cas de ciel dégagé. Source: Solar.org
Si une éclipse est rare, son impact sur l’équilibre du réseau n’est pas pour autant problématique. Les gestionnaires de réseaux ont déjà l’habitude de gérer des événements qui ont un impact bien plus important sur l’équilibre du réseau électrique, comme la finale d’une coupe du monde où des millions de téléspectateurs allument leur télévision au même moment !
ENTSO-E, la fédération européenne des gestionnaires de réseaux, a mené une analyse très poussée des impacts possibles de l’éclipse.
Les réponses possibles sont en fait classiques. Les gestionnaires de réseaux peuvent activer des unités de production électrique réactives avec le même taux de variation de puissance. Il s’agira par exemple d’augmenter la production de turbines hydrauliques et d’unités au gaz naturel (réaction dans les 10 secondes pour une production pouvant tenir 1/4h) ou des unités plus importantes (réaction dans le 1/4h et pouvant tenir 3h). Ils pourront également agir sur la diminution de consommation des industriels, via par exemple des agrégateurs qui assurent la coordination de ce délestage volontaire.
En Belgique, avec un parc photovoltaïque de 3.105 mégawatts, le réseau perdra au maximum 1.300 mégawatts solaires. Sans doute beaucoup moins, si les nuages se confirment dans notre ciel ce vendredi. Et en cas de besoin, Elia pourra par exemple activer la centrale hydroélectrique de Coo pour compenser cette baisse de production. Une situation comparable à la fermeture du réacteur nucléaire de Tihange en avril 2014.
Parc photovoltaïque européen. Source : EurobservER. Graphique : Observatoire des énergies renouvelables – www.apere.org
En Belgique, l’occultation solaire débutera à 9h27, atteindra son maximum (80%) à 10h34 et s’achèvera à 11h45. Seules des lunettes spéciales protègeront vos yeux, parfois disponibles en pharmacie ou chez les opticiens ou offertes par certains périodiques spécialisés (Siences & Vie, …).
Tableau : ENTSO-E. Les horaires de l’éclipse solaire sont indiqués sur base du Temps universel coordonné (UTC en anglais). Pour l’heure belge, ajouter 1 heure.