A neuf mois de la Conférence de Paris sur le Climat, les prises de positions se multiplient dans les cénacles internationaux. Tandis qu'au niveau local, certaines communes avancent beaucoup plus vite pour faire face aux réalités de terrain…
La crème des décideurs internationaux se réunira à Paris en décembre 2015 pour un Sommet climatique (COP21) de haut niveau. L’ensemble des pays, industrialisés et émergents, y définiront les objectifs de réduction de gaz à effet de serre (GES) pour la période post-2020. Ce futur « protocole » – qui remplacera celui de Kyoto – devrait inclure, on l’espère, des mesures fortes mais dont la pertinence, vu leur complexité, passera forcément un peu au-dessus de la tête du commun des mortels avant de se diluer dans les cadres légaux nationaux.
Mais les plus avisés des mandataires locaux l’ont compris depuis pas mal de temps: d’une manière ou d’une autre, ils seront aux premières loges. Et leurs électeurs seront forcément mis à contribution. D’une part pour prendre les mesures anticipatives ou préventives qui s’imposent pour maintenir les émissions de GES à un niveau « tolérable » et rester au-dessous des fameux 2°C de réchauffement établis par le GIEC comme étant le seuil minimal à ne pas dépasser. D’autre part pour anticiper les conséquences d’un bouleversement climatique qui se manifeste déjà çà et là de façon de plus en plus indiscutable. Car c’est bien à l’échelon local que se matérialisent, de la manière la plus évidente, à la fois les causes et les conséquences de ce changement climatique.
Sur le terrain, des collectivités s’impliquent
Depuis une dizaine d’années, des collectivités locales passent à l’action, en adoptant un Agenda21 local ou, depuis 2008, en signant la Convention des Maires. Cette dernière a été conçue à l’échelle européenne et fondée sur une large expérience collective de gouvernance locale. Elle propose un cadre de réflexion et de mise en œuvre adapté aux réalités locales. A ce jour, plus de 170 communes belges ont adhéré à la Convention des Maires.
Pour atteindre son objectif 100% renouvelables, la commune de Attert s’appuie sur l’association paracommunale « Au pays de l’Attert ». Celle-ci étudie les solutions énergétiques, active les financements et met place les projets concrets. C’est notamment grâce à elle qu’un réseau de chaleur bois-énergie alimente plusieurs bâtiments communaux et que les citoyens (et entreprises) investissent fortement dans des unités de production décentralisées (ici une unité de biogaz). La commune crée actuellement une filière de plaquette bois transfrontalière avec le Grand Duché du Luxembourg.
En Wallonie, une agence spécifique, l’AwAC (Agence wallonne de l’Air et du Climat), a été chargée d’orchestrer les actions sur ce terrain. Elle a notamment participé activement au lancement du projet-pilote POLLEC (Politiques Locales Energie Climat) qui, depuis 2012, accompagne les communes désireuses de s’engager concrètement dans un plan d’actions énergie durable. Stimulée par cette dynamique, une deuxième campagne POLLEC vient d’être lancée. Et pour celles qui désirent aller plus loin en visant la neutralité énergétique à long terme, le réseau belge des Territoires à Energie Positive offre de la visibilité, des possibilités d’échanges de bonnes pratiques et des outils supplémentaires. La formule phare de ce réseau semble avoir séduit les acteurs locaux : « Ne plus faire des projets sur les territoires, mais des projets de territoires ».
C’est que le processus à mettre en œuvre est forcément long et complexe. Construit à la lueur de bilans carbone et/ou énergie soigneusement établis, il touche peu ou prou à toutes les dimensions de la vie locale : bâtiment résidentiels et tertiaires, mobilité, activités industrielles, agricoles et forestières… Et il devra donc forcément être planifié et organisé de manière à s’intégrer de façon cohérente et « lisible » à la fois dans les politiques locales et dans les budgets communaux qu’on sait de plus en plus étriqués (lire nos articles « La question de l’énergie et du climat pousse les communes à plus de transversalité » et Le bilan carbone communal : un outil d’aide à la décision).
L’adhésion citoyenne est déterminante
Pour dépasser les mesures cosmétiques et développer une stratégie de longue haleine, l’adhésion populaire locale sera nécessairement déterminante tout au long du parcours. Il ne s’agit plus seulement de s’engager sur des mesures ponctuelles d’économie d’énergie dont les retombées peuvent être rapidement identifiables dans les budgets communaux, mais d’envisager plus largement au niveau local des objectifs aux contours plus diffus comme des tonnes de CO2 évitées et des impacts climatiques à plus ou moins long terme. Ce qui suppose d’ouvrir et d’élargir en termes intelligibles le débat sur des enjeux locaux comme l’emploi, les activités économiques ou la qualité de la vie locale par exemple. C’est l’une des préoccupations majeures des acteurs déjà engagés dans de telles démarches : le maintien sur la durée du niveau d’implication citoyenne et la pérennisation des actions engagées.