Le Gouvernement wallon s’est accordé sur un plan qui vise à ré-équilibrer le marché des certificats verts et à annuler la fameuse bulle. Mais pourquoi ne pas utiliser la taxe carbone ?
Le Gouvernement wallon a adopté le 17 septembre dernier en première lecture un avant-projet de décret qui révise le mécanisme de soutien aux productions d’électricité verte (pour vous familiariser avec ce mécanisme, lisez ces explications).
Le mécanisme des certificats verts est donc maintenu – et non remplacé par un système de primes comme le préconisait la CWaPE – mais il sera adapté pour optimiser le soutien aux productions renouvelables.
L’objectif global est de retrouver un équilibre sur le marché des certificats verts et d’annuler la fameuse bulle de certificats verts – cette dette qui pèse sur le budget et les ménages wallons depuis 2010 (pour bien comprendre ce dossier complexe, nous vous invitons à lire notre analyse : Bulle de certificats verts : enfin une solution ?).
Sur le marché wallon des certificats verts, l’offre est largement supérieure à la demande. Pour absorber ce surplus constant, le Gouvernement wallon agit sur deux leviers :
-Une augmentation des quotas imposés aux fournisseurs d’énergie, qui devront donc acheter un plus grand volume de certificats verts.
-Une diminution du soutien aux filières renouvelables. Le nombre de certificats verts émis sur le marché diminuera donc. Les producteurs renouvelables ne s’inquiètent pas outre-mesure de cette baisse du soutien, étant donné que les technologies offrent aujourd’hui un meilleur rendement : les coûts des matériaux photovoltaïques sont en baisse constante, tandis que les nouvelles générations d’éoliennes coûtent moins cher par MWh produit. Une baisse du soutien est donc justifiée.
Par ces deux mesures, le Gouvernement wallon espère retrouver un équilibre sur le marché d’ici 2025.
Comment financer l’annulation de la dette ?
Reste l’épineuse question de la dette de certificats verts. Plusieurs opérations de portage et de temporisation ont déjà été menés pour racheter les certificats excédentaires sans pour autant les annuler.
Le Gouvernement wallon n’a pas retenu la proposition d’une nouvelle taxe auprès des ménages, avancée par la CWaPE et la Task-Force chargée de proposer des solutions.
Pour annuler définitivement la dette, le Gouvernement a préféré faire appel au secteur bancaire et retenu l’offre de BNP Paris Fortis, qui créera un mécanisme spécial afin de payer chaque année à Elia tous les certificats verts wallons qui n’ont pas trouvé preneur sur le marché. L’opération bancaire sera financée par l’émission d’emprunts obligataires labellisés « verts » et se remboursera grâce à la surcharge Elia, payée par les consommateurs wallons via leur facture d’électricité. Ce modèle s’appuie sur une surcharge payable durant encore 20 ans mais allégée (7,58 euros par MWh à partir de 2025, au lieu de 13,82 euros par MWh actuellement).
Enfin, le Gouvernement wallon propose un arrangement à l’amiable avec les 11.000 ménages qui ont introduit un recours en justice contre la Wallonie. Réunis au sein de l’association TPCV, ces ménages producteurs photovoltaïques bataillent depuis 2013 pour maintenir les 15 années de certificats verts promis aux prosumers, et refusent la décision de limiter ce soutien à 10 ans.
Il nous semble hypothétique qu’une solution à l’amiable soit trouvée.
Pourquoi pas la taxe carbone ?
Face à ce plan wallon, les réactions sont plutôt mitigées. Les partis d’opposition le juge encore flou et sans garantie sur l’annulation de la dette.
Dans un communiqué, EDORA – la fédération des producteurs renouvelables – « s’étonne que les moyens pour financer la transition énergétique continuent à reposer quasi exclusivement sur les consommateurs d’électricité et que des pistes telles que la tarification carbone n’aient pas été envisagées. »
Il est en effet dommage que le politique s’en tienne à des mesures financées par les ménages, alors que des recettes fiscales sont possibles ailleurs.
« La taxe carbone serait une bonne piste », estime ainsi Gregory Neubourg, expert photovoltaïque. « Il serait logique que cette taxe, appliquée aux entreprises qui émettent beaucoup de CO2, soit utilisée pour financer le soutien aux productions d’énergies renouvelables. En Région bruxelloise, la taxe carbone sert à alimenter un Fonds Climat qui finance des politiques renouvelables. En Wallonie, la taxe carbone sert actuellement à financer des mesures pour …la compétitivité des entreprises. Il serait plus judicieux d’utiliser ces recettes pour financer la transition énergétique. »
Une idée à suivre, donc.