Les citoyens pourront investir dans les nouveaux parcs éoliens offshore. Pour les coopératives, cela représente une opportunité inédite de participer à la transition énergétique. Mais qui comporte aussi quelques défis.
Actuellement, la Belgique dispose d’une première zone dédiée à l’éolien en mer, sur le Thorntonbank, à proximité de la frontière néerlandaise (voir illustration ci-dessous).
Elle réunit 9 parcs éoliens (399 éoliennes) pour une puissance totale de 2,2 GW, ce qui est comparable à la capacité des deux plus grands réacteurs nucléaires (Doel 4 et Tihange 3) réunis. De quoi couvrir 10% des besoins en électricité de la Belgique ou fournir la moitié des ménages belges.
Le gouvernement fédéral travaille désormais sur une deuxième zone, baptisée Princesse Elisabeth et proche de la frontière française, qui permettra d’accueillir 3,5 GW supplémentaires.
Selon le planning actuel, un appel d’offres permettra de sélectionner les projets entre 2024 et 2026. Le premier parc éolien, d’une capacité de 700 MW, pourrait être raccordé d’ici fin 2026. Les exploitations suivantes pourraient être raccordées à partir de début 2028.

Une participation citoyenne
Concernant cette deuxième zone, le cadre légal prévoit une participation citoyenne, à l’image de ce qui est suggéré dans le cadre de référence en Wallonie pour les parcs éoliens terrestres. Lors de l’appel d’offres, les projets qui impliquent des citoyens se verront attribués un plus grand nombre de points dans les critères de sélection.
Il s’agit donc d’une opportunité historique pour les citoyens de s’impliquer largement dans la transition énergétique et de réinvestir les bénéfices au niveau local.
En mer du Nord, les citoyens pourront participer de deux manières :
- soit par un co-financement des éoliennes (actions ou prêts);
- soit via des Communautés d’énergies renouvelables, qui seront co-propriétaires des éoliennes.
Selon une analyse de l’université de Gand, cette deuxième option s’avère la plus bénéfique au niveau sociétal, car elle permet de :
- Mobiliser l’épargne citoyenne qui dort sur des comptes en banque (98 milliards € fin 2021, selon la Banque Nationale de Belgique) ;
- Faciliter les décisions politiques sur le long terme ;
- Stabiliser le prix de l’électricité pour les ménages sur le long terme et de stimuler une électrification rapide du chauffage et de la mobilité (les ménages bénéficiant d’un prix avantageux seront incités à s’équiper en pompe à chaleur et voiture électrique).
- Renforcer les communautés locales d’énergie et d’accélérer la transition énergétique locale ;
- Distribuer les bénéfices de manière plus équitable, élargissant ainsi l’implication sociétale ;
- Fournir une plus grande diversité et résilience économique.
Moins de CO2
Au niveau climatique, la co-propriété citoyenne dans l’éolien offshore permettra, selon une analyse de l’Université de Gand, une réduction directe des émissions de CO2 de 1,12 M tonnes.
De manière indirecte, les ménages équipés en pompes à chaleur et voitures électriques, réduiront plus encore ces émissions. Mais compte tenu que ces équipements vont tripler la consommation électrique des ménages, la réduction sera limitée à 2,55 M tonnes.
Au total, l’offshore citoyen permettra donc une réduction des émissions de CO2 de 3,67 M tonnes.
Des partenaires fiables, avec des défis en vue
Selon l’université de Gand, les Communautés d’énergies renouvelables sont des partenaires fiables pour financer la construction des éoliennes et gérer les risques.
Néanmoins, cela pose de réels défis à relever.
Voici un tableau des coopératives citoyennes existantes (“co-ops”), qui sont autant de Communautés potentielles :

Si les Communautés ou coopératives citoyennes investissent dans l’éolien en mer du Nord, cela représente une opportunité historique mais aussi de nombreux défis :
- Les membres passeront de 95.000 à 350.000 ;
- Le capital passera de 100 à 550 €M ;
- La production passera de 225 à 800 GWh ;
- Il s’agira de gérer de larges volumes et les risques d’équilibrages associés ;
- Les Communautés connaîtront une forte augmentation structurelle, notamment de leur solvabilité.
Les bénéfices de la vente d’électricité ne vont pas uniquement accroître le capital, car une partie sera investie par les Communautés ou coopératives dans des projets locaux :
- Des réseaux de chaleur ;
- Des achats groupés d’énergie ;
- Des travaux de rénovation de bâtiments ;
- L’équipement de batteries collectives ;
- Des plateformes locales de mobilité électrique (voitures partagées, …) ;
- Une implication plus générale des différentes strates de la population.
Selon l’université de Gand, des questions restent cependant ouvertes, et notamment celle-ci :
L’appel d’offre prévoit que les coopératives ne soient associées qu’à un seul consortium pour déposer un projet de parc éolien. Si ce consortium ne remporte pas le marché, la co-propriété citoyenne sera-t-elle abandonnée ?
Le texte légal étant actuellement ambigu sur ce point, les coopératives proposent d’ouvrir la possibilité de former des pré-accords avec plusieurs consortiums afin de maximiser leurs chances de succès.
Pour l’heure, les coopératives citoyennes wallonnes et flamandes se mobilisent en vue de structurer leurs forces.
Par ailleurs, Ecco Nova, large plateforme de financement participatif durable, compte également se positionner dans le cofinancement des nouveaux parcs offshore.